Point 4 (suite 9)
Chapitre 13 – La vertu libératrice de la discipline
Plan Résumé
(stance 17)
1) Considération des bienfaits et méfaits,
2) Son essence, 3) sa classification,
4) Les caractéristiques de chaque classe
5) Son développement et 6) sa pureté.
Avec en fin 7) ses fruit ; ces sept points résument
La vertu libératrice de la discipline.
I – Considérations des bienfaits et méfaits
Celui qui pratique le don mais n’a pas de discipline ne pourra pas obtenir les merveilleuses et pures existences, humaines et divines, comme c’est exprimé dans L’Introduction à la Voie du Milieu :
Celui dont les jambes de la discipline sont rompues
Chutera dans les états infortunés,
Même s’il est doté de la richesse de la générosité.
De plus, sans discipline, il ne peut rencontrer l’enseignement authentique, comme l’exprime Le Sutra de l’Acquisition de la Discipline :
Sans yeux, nous ne verrions pas les formes ;
Ainsi, sans discipline, nous ne reconnaîtrons pas le dharma. »
Il ne peut pas non plus aller au-delà des trois sphères du monde, telle que nous pouvons le voir dans le même sutra :
Sans jambes, nous ne pourrions pas parcourir un chemin ;
De même, sans discipline, nous ne pourrons nous libérer. »
Sans discipline on ne pourra pas obtenir l’insurpassable éveil car la voie vers l’état de bouddha serait alors incomplète.
Par contre, grâce à celle-ci, nous obtiendrons une existence excellente. C’est ce qui est dit dans Le Résumé des ârya :
Par la discipline, nous délaisserons
La condition de nombreuses migrations animales,
Nous abandonnerons “les huit états sans disponibilité”,
Et nous rencontrerons toujours « les opportunités favorables ».
Avec la discipline, on pose la base de tous les heureux et excellents bienfaits, suivant les paroles de La Lettre à un ami :
La discipline est la base de toutes les qualités,
Comme la terre est le fondement de l’animé et de l’inanimé. »
Avec la discipline, on est comme une terre fertile sur laquelle la moisson des qualités positives peut devenir fructueuse, comme l’exprime L’Introduction à la Voie du Milieu :
Quand les qualités positives mûrissent parfaitement
Dans le champ de la discipline,
L’on jouit de leurs fruits sans interruption.
Grâce à la discipline, de nombreuses formes de l’état d’absorption naîtront. Il est dit dans Le Sutra de la Flamme Lunaire :
Une parfaite discipline a pour bénéfice,
L’obtention rapide d’un état d’absorption dénué de passions. »
Avec la discipline, tous les souhaits que l’on formulera se réaliseront, comme l’exprime Le Sutra de la Rencontre du Père et des Fils :
Quiconque garde une discipline parfaitement pure
Verra tous ses souhaits s’accomplir. »
Grâce à la discipline, il est facile de réaliser l’éveil, telle que c’est exprimé dans ce même sutra :
Une pure discipline ayant de multiples bienfaits,
Il ne sera pas difficile d’arriver à actualiser l’éveil.
La discipline a toutes ces qualités et plus encore, tel que c’est évoqué dans Le Sutra de l’Acquisition de la Discipline :
Avec de la discipline, les bouddhas nous apparaîtront
Et nous les rencontrerons.
Être discipliné est de tous les ornements le plus merveilleux,
C’est le domaine de toutes les satisfactions ;
Avoir de la discipline est loué par tout le monde.
II – Essence
La discipline dans son essence est constituée de quatre qualités qui sont décrites dans Les Degrés de Bodhisattva :
Sachez que l’essence de la discipline,
C’est posséder quatre qualités.
Quelles sont-elles ?
– Elle est reçue parfaitement d’une autre personne,
– La motivation qui l’anime est parfaitement pure,
– Elle répare ses aspects endommagés,
– Elle est attention et respect pour éviter ce qui pourrait l’endommager.
Ces quatre qualités se résument à acquérir et à garder. La première est à adopter et les trois dernières à observer.
III – Classification
La discipline comprend trois principaux types : la discipline des engagements, la discipline consistant à regrouper les qualités positives et la discipline qui œuvre au bien des vivants.
La première canalise l’esprit ; la seconde fait mûrir ses qualités et la troisième fait murir tous les vivants.
IV – Caractéristiques de chaque classe
1. La discipline des engagements
La discipline des engagements comprend la discipline commune et la discipline particulière.
1.1 La discipline commune
La discipline commune est celle des sept types de préceptes de libération personnelle, qui sont présentés dans Les Degrés de Bodhisattva :
La discipline des vœux de bodhisattva est l’adoption parfaite d’un des sept types de vœux de libération individuelle d’ordre régulier ou séculier, c’est à dire la discipline de l’ordination majeure pour les hommes (gelong) ou pour les femmes (gelongma), la discipline de l’ordination probatoire pour les femmes (gelobma), des vœux monastiques mineurs pour les hommes (getsul) ou pour les femmes (getsulma) et celle des vœux séculiers pour les hommes (genyen) ou pour les femmes (genyenma). Il faudra aussi bien distinguer la vocation laïque de la vocation monastique.
Les actions fondées sur les tendances nuisibles à autrui sont empêchées par ces engagements. Ils permettent de nous en détourner efficacement pour notre propre bien mais ceux de bodhisattva nous en écartent pour le bien d’autrui.
Dans Le Sutra des Questions de Nârâyana, il est dit :
La discipline n’est pas respectée pour acquérir
Un pouvoir temporel, une existence supérieure,
L’état d’Indra, de Brahmâ, des richesses, la puissance,
Un aspect physique ou d’autres raisons du même ordre.
Elle n’est pas gardée non plus par crainte de l’horreur
Des états infernaux ou même des renaissances animales.
Elle n’est pas gardée par peur du monde de la mort.
Elle est par contre observée afin d’introduire autrui
Aux modalités de l’état de bouddha,
Et elle est tenue afin de prendre soin du bonheur
Et du bien de tous les vivants.
1.2 La discipline particulière
Le maître Shântideva enseigna :
Suivant Le Sutra de la Quintessence Céleste il existe :
Cinq chutes fondamentales de rang royal,
Cinq chutes fondamentales de rang ministériel
Huit chutes fondamentales de niveau subalterne ;
Nommément, dix huit chutes qui ne sont en substance
Que quatorze et qu’il s’agit d’éviter.
Ceci est aussi énoncé dans L’Abrégé des Instructions :
(1) Dérober les biens offerts aux trois joyaux est un cas de violation totale entraînant l’expulsion ;
(2) Faire abandonner le dharma authentique a été enseigné par le Bouddha comme en étant un second ;
(3) S’emparer de la tenue d’un moine pleinement ordonné ;
(4) Le battre, l’enfermer, même s’il a une discipline corrompue ;
(5) Déchoir de l’ordination ;
(6) Commettre les cinq actes aux conséquences immédiates ;
(7) Soutenir des vues erronées ;
(8) Faire régner la terreur sur des villages et autres ont été enseignées par le Victorieux comme étant des chutes fondamentales.
(9) Professer la vacuité à des êtres sans que leur esprit y soit préparé ;
(10) Détourner du parfait éveil ceux qui cheminent vers l’état de bouddha ;
(11) Abandonner complètement la discipline de libération individuelle;
(12) Opter pour le mahayana en considérant que les cheminements spirituels de certains aspirants ne permettent pas d’abandonner l’attachement et les autres passions et introduire aussi des conceptions venant de courants de pensée extérieurs ;
(13) Vanter ses mérites et déprécier autrui pour les honneurs, les louanges ou les biens matériels (fol 107b) ;
(14) Proclamer l’opposé de la réalité en disant par exemple : « J’ai une profonde “expérience » ;
(15) Inciter quelqu’un à infliger une punition à un moine ;
(16) Faire en sorte que l’on fasse un don aux trois joyaux et s’emparer de celui-ci ;
(17) S’efforcer de sortir quelqu’un d’un état de paix de l’esprit ;
(18) Donner les richesses de l’intégration parfaite de la méditation à ceux qui les réduisent à des formules verbales;
Telles sont les chutes fondamentales qui pour les êtres seront la cause des grands états infernaux.
Le seigneur Serlingpa, dit aussi :
Suivant les Degrés de Bodhisattva il ya
Quatre actions semblables aux cas de violation
Et quarante six fautes à abandonner.
En ce qui concerne les quatre actions similaires à une violation, il est dit dans Les Vingt Sections de l’Engagement, l’abrégé du sens des Degrés de Bodhisattva :
(1) Se valoriser et déprécier autrui par attachement aux possessions et aux honneurs ;
(2) Ne pas donner, par avarice, l’enseignement ou des richesses à ceux qui souffrent et sont sans protection ;
(3) Si autrui dévoile ses fautes, ne pas en tenir compte et le réprimander par irritation ;
(4) Abandonner le mahayana et exposer un enseignement ayant de vagues ressemblances avec le dharma authentique.
Les “quarante six fautes” y sont aussi mentionnées :
Ne pas faire une triple offrande aux trois joyaux ;
Ne suivre que ce que nos désirs nous suggèrent et caetara.
2. La discipline consistant à regrouper les qualités positives
La discipline consistant à regrouper les qualités positive est, sur la base des vœux de bodhisattva, de développer des bienfaits d’éveil en corps, en parole et en esprit.
En quoi consiste-t-elle ?
Il est dit dans Les Degrés de Bodhisattva :
En s’appuyant et en préservant la discipline de bodhisattva
Il faut s’appliquer à l’étude, la réflexion,
La méditation et les joies de la solitude.
Il faut honorer et servir les maîtres spirituels;
Se mettre au service des malades et les assister ;
Faire des dons excellents, louer les qualités ;
Se réjouir bienfaits développés par autrui
Et supporter leur mépris ;
Dédier nos bienfaits à l’éveil ;
Faire des souhaits et des offrandes aux trois joyaux ;
Cultiver une attitude énergique et demeurer circonspect ;
Il faut retenir les instructions, se montrer consciencieux,
Contrôler l’action des sens et manger avec modération ;
S’appliquer aux exercices spirituels en ne dormant pas
Pendant la première et la dernière partie de la nuit ;
S’en remettre à des êtres éclairés et à un ami spirituel,
Et ayant examiné ses erreurs, les dévoiler et s’en écarter.
La discipline qui regroupe les qualités positives,
Consiste en la pratique, la préservation
Et le parfait développement de ces différentes choses.
3. La discipline qui oeuvre pour le bien des vivants
La discipline qui oeuvre pour le bien des vivants comprend treize aspects principaux, décrits dans Les Degrés de Bodhisattva :
Devoir assumer des activités utiles
Dissiper les souffrances de ceux qui souffrent,
Montrer à ceux de moindre intelligence comment s’en sortir,
Reconnaitre la bonté de chacun et leur rendre,
Protéger les autres de ce qui les effraie,
Soulager les souffrances du deuil,
Donner suivant les besoins,
Rassembler ceux qui aspirent au dharma,
Les introduire à ce qui correspond à leur mentalité
Amener la joie par de parfaites qualités,
Corriger correctement ceux qui se fourvoient,
Inspirer par de grandes capacités,
Et stimuler l’inspiration de l’enseignement.
D’autre part, pour stimuler la confiance avec l’autre et se prémunir de l’aveuglement vis à vis de soi, il est important d’éviter les actions impures par ses trois portes et s’adonner aux trois puretés.
3.1 Les comportements impropres associés au corps
Ce sont les sauts et les allures trépidantes inutiles ; ces attitudes inconvenantes et inopportunes devront êtres abandonnées.
3.2 Les comportements appropriés associés au corps
Il s’agit de rester posé, doux et d’avoir le sourire.
Sois maître de toi ;
Sois toujours souriant ;
Rejette complètement les airs sombres, froncés et inamicaux ;
Sois cordial et chaleureux.
Lorsque nous voyons quelqu’un, comment doit-on le percevoir ?
Ainsi quand tes yeux s’arrêtent sur des personnes,
Regarde les avec amour et d’une manière franche,
En te disant : c’est grâce à ces êtres
Que je m’éveillerai à l’état de Bouddha.
Lorsque nous nous asseyons, comment doit-on s’installer ?
Il est dit dans l’Introduction aux Pratiques de Bodhisattva :
Ne t’assieds pas en étendant les jambes,
Et ne te frotte pas les mains. »
Lorsque nous prenons nos repas, comment doit-on manger ?
Il est dit dans l’Introduction aux Pratiques de Bodhisattva :
Ne mange pas bruyamment, la bouche pleine et ouverte. »
Lorsque nous sommes actif, comment doit-on agir ?
Il est dit dans l’Introduction aux Pratiques de Bodhisattva :
Ne déplace pas un siège négligemment et bruyamment,
Ne ferme pas les portes violemment,
Et affectionne de rester humble et réservé.
Quand nous nous endormons, comment doit-on se coucher ?
Il est dit dans l’Introduction aux Pratiques de Bodhisattva :
Allonge-toi du côté souhaité,
À l’exemple du protecteur des êtres reposant en nirvana. »
3.3 Les comportements impropres associés à la parole
Il faut cesser d’être volubile et acerbe. Les Nuées des Rares et Sublimes ârya expose les méfaits de n’être pas avare en paroles.
Il y est dit :
La frivolité nous détourne vraiment du dharma authentique ;
L’esprit se fige et devient très versatile.
Nous nous éloignons complètement de la paix de l’esprit
Et de la vision profonde.
Tels sont les méfaits de priser les discussions.
N’avoir pas toujours du respect envers les lamas,
Prendre plaisir aux histoires indécentes,
Se complaire dans la futilité, nuit à l’intelligence supérieure ;
Tels sont les défauts de se plaire à discourir.
En ce qui concerne les méfaits des paroles vives, il est dit dans Le Sutra de la Flamme Lunaire :
Même si nous voyons les autres commettre des erreurs,
Nous ne clamerons pas leurs méfaits, quelques qu’ils soient,
Car nous produirions un karma similaire à l’acte en question
Et en conséquence, expérimenterions son résultat.
Et dans Le Sutra exposant l’Absence d’Apparition de Tous les Dharma, il est dit :
Quand un bodhisattva dénonce des manquements,
Il s’éloigne de l’éveil.
Et s’il les révèle par jalousie, il s’en éloigne aussi. »
C’est pourquoi l’on abandonnera une expression verbale loquace et acérée.
3.4 Les comportements impropres associés à l’esprit
Elles se résument à l’attachement aux possessions et aux honneurs, l’attachement au sommeil et à l’indolence, et autres attitudes similaires.
• En ce qui concerne les méfaits de l’attachement aux possessions et aux honneurs, il est dit dans Le Sutra qui Exhorte les Motivations Nobles :
Maitreya, un bodhisattva doit être conscient que Possessions et honneurs engendrent l’attachement ;
Il doit savoir que possessions et honneurs favorisent l’agressivité, Entretiennent l’aveuglement mental et font naître l’hypocrisie ;
Il doit observer que ceux-ci furent désavoués par tous les Bouddhas ;
Il doit enfin être conscient que tels des prostituées
Racolant le passant,
Ils spolient les sources de bienfaits. »
Même si l’on obtient des possessions, elles restent insatisfaisantes.
Dans Le Sutra de la Rencontre du Père et des Fils, il est dit :
Même si nous buvions de l’eau en rêve,
Cela n’étancherait pas notre soif ;
De même, la quête d’expériences désirables
Se révélera insatisfaisante.
En considérant cela, on saura restreindre ses envies et éprouver du contentement.
• Quant aux méfaits de se plaire à dormir, il est dit :
Celui qui se complaît dans le sommeil et l’apathie,
Verra son intelligence supérieure s’émousser fortement
Et ses facultés intellectuelles en seront gravement affectées.
Il portera constamment atteinte à l’intelligence immédiate.
Et aussi :
Celui qui se complaît dans le sommeil et l’apathie,
Verra son intelligence supérieure sombrer
Dans des états d’inconscience, de paresse et d’indifférence.
Des démons non-humains trouveront alors l’occasion
De l’assaillir quant il demeurera dans la solitude.
C’est pourquoi l’on abandonnera ces attitudes impropres de l’esprit.
3.5 Les comportements appropriés associés à l’esprit
Elles consistent à demeurer dans la confiance et les autres qualités qui ont été exposées précédemment.
V – Développement
La discipline se développe par l’expérience première, la compréhension supérieure et la dédicace, telle que ce fut présenté pour la vertu libératrice du don.
VI – Pureté
La pureté de la discipline vient de la vacuité omniprésente et de la compassion, tel que ce fut présenté au chapitre sur le don.
• “Faire un don qui procède de la compassion”, signifie donner en étant affecté par les souffrances communes où spécifiques des vivants.
VII – Fruits
Les fruits de la discipline sont temporaires et ultimes.
(1) L’ultime résultat est l’obtention de l’éveil insurpassable.
Il est dit dans Les Degrés de Bodhisattva :
Ainsi, les bodhisattvas ayant accompli parfaitement
La perfection de la discipline,
Réalisant l’insurpassable et parfait éveil,
Achèveront le véritable état de Bouddha
(2) En ce qui concerne les fruits temporaires, sans même les désirer, on obtiendra les plus hauts bonheurs et bien-être du samsara.
Il est dit dans Le Recueil des Bodhisattvas :
Shâriputra, un bodhisattva à la discipline parfaitement pure,
Éprouvera immuablement les jouissances humaines
Et divines les plus sublimes.
Sans se laisser éblouir par ces bonheurs et ce bien-être, on devra poursuivre son chemin vers l’éveil.
Dans Le Sutra des Questions de Nârâyana, il est dit :
Le bodhisattva qui se conforme aux règles de cette discipline restera parfaitement inébranlable même dans la position de monarque universel.
Même s’il devait l’assumer, il aspirerait encore fidèlement à l’éveil. L’état d’Indra ne l’affecterait pas plus ; même à ce niveau,
il aspirerait toujours scrupuleusement à l’éveil.
Ceux qui intègrent la discipline seront honorés et loués par les hommes ainsi que par les non-humains.
Il est dit dans le même sutra :
Le bodhisattva qui s’en tient aux règles de la discipline, sera révéré par les dieux, loué par les nâga, célébré par les yaksha, honoré par les gandharva, servi par les brahmanes, les nobles, les marchands et les maîtres de maison, et cela continuellement.
Les Bouddhas auront toujours leur esprit tourné vers lui,
Et l’autorité lui sera toujours conférée
Par les gens de ce monde et leurs dieux.
Ainsi s’achève la section consacrée à la vertu libératrice de la discipline treizième Chapitre du Joyau Magique, L’Ornement de la Précieuse Libération. |