La cérémonie du refuge

    1. Préliminaires
      1. Une célébration joyeuse
      2. L’état d’esprit et la motivation
    2. la cérémonie proprement dite
      1. Pourquoi une représentation extérieure ?
      2. Une situation sacrée
      3. Récitation de la formule du refuge
      4. Les instructions du refuge
      5. Les choses à pratiquer et à abandonner sont les suivantes :
      6. Les conseils généraux sont en rapport avec la pratique :
    3. Conclusion de la cérémonie

La description suivante de la cérémonie du refuge a été faite à partir de cérémonies et d’instructions données par Lama Denis Teundroup à l’Institut Karma-Ling.

Préliminaires

Une célébration joyeuse

Vous avez déjà eu des explications sur le sens du refuge. Maintenant, en préliminaire à la cérémonie proprement dite, il est important de prendre la mesure de ce que vous allez faire.

Le refuge est le premier pas sur la voie ; en l’effectuant nous franchissons le seuil du dharma, entrons à l’intérieur de celui-ci. Nous entrons dans le cheminement qui met fin au cycle indéfini d’illusions et de souffrances du samsara. Cela ne veut pas dire qu’on va arriver à l’éveil tout de suite, mais, alors que le cercle vicieux des conditionnements se serait perpétué indéfiniment si nous n’avions rien fait, en prenant refuge, nous commençons le cheminement qui, finalement, coupera ce cercle vicieux d’existences conditionnées. C’est le début de la fin du samsara !

Le refuge établit une connexion spirituelle qui va nous aider à nous diriger, dès maintenant et jusqu’à l’éveil : elle sera une source d’inspiration et une assistance : en cette vie, au moment de la mort, et jusqu’à l’éveil. C’est un lien spirituel avec l’éveil et, à ce titre, une protection par rapport aux errances, aux confusions, aux difficultés et aux souffrances du samsara. C’est la chose la plus précieuse que nous puissions recevoir.

En prenant refuge nous ne sommes pas seul : cette voie a été ouverte par Shakyamuni il y a deux mille cinq cents ans, et d’innombrables personnes l’ont suivie depuis. Nous participons aujourd’hui de son héritage de richesse et d’inspiration.

Être aujourd’hui dans la situation en laquelle nous pouvons prendre refuge ne devrait pas être considéré comme fortuit ; c’est le résultat d’une longue évolution antérieure, d’une longue accumulation de karma positif qui arrive maintenant à maturité.

En prenant refuge nous donnons à notre vie une orientation vers l’éveil, nous nous donnons aussi les moyens de cheminer effectivement vers l’émancipation et le bonheur essentiels. C’est la chose la plus importante que nous puissions faire dans notre vie !

Ainsi, nous prenons conscience du sens et de la valeur de la prise de refuge. Et pour toutes ces raisons nous nous réjouissons : prendre refuge est un événement fondamentalement heureux. Il est important que nous l’apprécions comme tel et que nous nous réjouissions vraiment, profondément. Cette joie est à la base de la cérémonie, et traduit l’ambiance générale de celle-ci.

L’état d’esprit et la motivation

Nous allons prendre refuge dans l’esprit du mahayana avec la compassion, l’ampleur et l’ouverture qui le caractérisent : dans la durée, et la motivation de notre geste. Ainsi, nous prenons refuge, non pas transitoirement, fût-ce jusqu’à notre mort, mais à partir de maintenant jusqu’à ce que nous arrivions à l’ultime éveil. Et nous ne prenons pas refuge seul, ni pour nous personnellement, mais associons à notre geste tous les êtres, où qu’ils soient, quels qu’ils soient, avec pour motivation d’accomplir le bien de tous ceux-ci. Nous dépassons une mentalité égocentrique en éveillant en nous cette attitude d’esprit, dans son immensité et sa générosité universelle.

la cérémonie proprement dite

Pour l’essentiel, elle consiste à affirmer solennellement notre décision à aller pour refuge vers les Trois joyaux. Nous le faisons devant tous les éveillés, bouddhas et bodhisattvas, en face de notre propre conscience à l’état pur, et devant le lama représentant de cette tradition, qui nous propose d’y entrer à notre tour.

Pourquoi une représentation extérieure ?

Le bouddha intérieur est la nature pure de l’esprit ; cette nature ne nous est pas extérieure mais elle nous est aujourd’hui inconnue. Aussi pour entrer en relation avec elle nous utilisons une représentation symbolique qui nous rend sa présence accessible à un niveau relatif. Nous nous imaginons ainsi tous les bouddhas et bodhisattvas, en face de nous, dans un espace abstrait, autour de l’autel et du lama qui nous donne refuge. Mais cette représentation est contingente, l’essentiel est de percevoir leur présence réelle avec le sentiment de respect et l’aspiration qu’elle nous inspire.

Une situation sacrée

Nous allons entrer maintenant dans le rituel proprement dit, qui est une situation sacrée. Cela ne signifie pas particulièrement “pieuse” ou “dévote” : cet espace et ce que nous allons y faire sont sacrés pour autant que nous laissions notre ego à la porte, pour ainsi dire.

Pour entrer dans le sacré de cet espace, en présence des Trois joyaux, et leur demander refuge, nous faisons trois prosternations. C’est le geste traditionnel de l’hommage, qui est ici, plus particulièrement, l’expression de notre demande du refuge. En faisant ces prosternations, on ne rend pas hommage à une statue ou à une représentation, ce n’est pas de l’idolâtrie. La prosternation est un geste symbolique d’humilité, d’abandon de l’ego et, en même temps, d’ouverture. On abdique l’ego face à l’éveil. La prosternation est l’expression d’un double mouvement en lequel on se vide de soi-même pour s’ouvrir à la nature de bouddha. (1)

C’est donc en pensant que vous êtes en présence des différents aspects du refuge que vous faites ces trois prosternations, et au travers de celles-ci vous pensez que vous demandez le refuge.…

Récitation de la formule du refuge

Maintenant nous allons répéter trois fois la formule du refuge qui est ce par quoi nous demandons pleinement et recevons le refuge. Elle dit :

« Bouddhas et bodhisattvas, veuillez tous m’entendre !
Maître, veuillez m’entendre !
Moi, (à ce moment nous disons notre nom),
Je vais pour refuge vers le bouddha, suprême parmi les hommes,
Je vais pour refuge vers le dharma, suprême liberté de passion,
Je vais pour refuge vers le sangha, suprême parmi toutes les assemblées. »

Nous allons répéter trois fois cette formule, du fond du cœur car elle est le support de l’intention correspondante, qui est tout l’essentiel.

Vous répétez après moi une première fois la formule (2), en gardant en vous l’état d’esprit qui correspond. (Première récitation)

Pendant la deuxième récitation que nous allons faire maintenant, vous pensez que vous recevez le refuge et qu’ayant reçu celui-ci vous ferez tout votre possible pour suivre cet engagement et cheminer sur la voie de l’éveil. (Deuxième répétition)

Pendant la troisième répétition, vous pensez que vous garderez pleinement ce refuge et pratiquerez dans son esprit autant que vous en êtes capable. (Troisième répétition)

Au terme de cette troisième répétition, le lama fait un claquement de doigts en disant une formule signifiant :“c’est accompli !”, à ce moment précis vous pensez que vous avez complètement et définitivement reçu le refuge et vous répondez alors : “parfait !”

Ensuite, en signe du refuge, le lama va couper une mèche de cheveux au sommet de votre tête, vous donner autour du cou un ruban et vous présenter un nom du dharma.

– La mèche de cheveux qu’il coupe symbolise la coupure d’avec votre vie ancienne et d’avec ce qui vous empêchait de pratiquer le dharma.

– Le ruban que vous recevez est le support de l’influence spirituelle des Trois joyaux et le symbole de la connexion que vous avez établie avec eux.

– Le nom que vous recevez est votre nouveau nom de pratiquant du dharma. En prenant refuge vous êtes devenu une nouvelle personne, aussi recevez-vous un nouveau nom qui indique votre nouvelle identité : celle de cette personne qui s’est tournée vers l’éveil et s’est déterminée à cheminer dans la voie du dharma. Ce nom peut être utilisé de différentes façons : ce ne serait peut-être pas facile de l’utiliser systématiquement, mais néanmoins, vous pouvez l’utiliser dans certains cas, quand vous le souhaitez, et quand vous êtes dans le contexte du dharma. En tous cas, lorsque vous l’utilisez, ce nom fait appel en vous à cette personne qui a aujourd’hui pris l’engagement du refuge ; c’est un rappel de cet engagement et un moyen de le garder présent en vous. Ce rappel peut vous aider à conformer vos gestes quotidiens à ce choix et aux engagements du dharma. D’ailleurs, les noms qui sont donnés expriment des idées positives et sont, par là même, une coïncidence propice et un encouragement à actualiser, petit à petit, ce qu’ils expriment.

Vous vous approchez du lama et il coupe la mèche de cheveux au sommet de votre tête disant : « Heureux que cette mèche soit coupée ? », ce à quoi vous répondez : «  Je m’en réjouis ».

Il vous donne le ruban qu’il pose sur votre nuque (3) et vous remet votre nom inscrit sur un papier.

Vous lui présentez alors une offrande avec une écharpe blanche, une “khata”. Ce don symbolise le fait que vous vous dédiez au dharma et à sa pratique. C’est aussi une façon d’exprimer votre appréciation pour le refuge que vous avez reçu, c’est un geste de remerciement, de gratitude.

Ensuite vous vous rasseyez pour entendre “les instructions du refuge”.

Les instructions du refuge

Lorsque l’on prend refuge, il y a un certain nombre de conseils qui sont donnés : il y a des choses qu’il faut essayer de pratiquer, d’autres qu’il faut essayer d’abandonner, et des conseils généraux.

D’abord, il est important d’apprendre le respect pour les Trois joyaux. La dimension la plus importante de ce respect est intérieure, mais le respect intérieur se reflète et va de pair avec une attitude extérieurement respectueuse, et ce respect extérieur est une aide pour amplifier le respect intérieur. On apprendra donc à respecter attentivement les supports du bouddha, du dharma et du sangha, c’est-à-dire : les représentations du bouddha, les livres transmettant le dharma et les membres support du sangha.

Les choses à pratiquer et à abandonner sont les suivantes :

– Ayant pris refuge dans le bouddha, la réalisation et l’état d’éveil essentiel, il ne faudrait pas quitter ce refuge ultime pour de nouveaux refuges contingents, que ce soient : des personnes, des choses, des idéologies ou des dieux encore liés au samsara, c’est-à-dire à la dualité. Donc, autant que vous le pourrez, vous abandonnerez les refuges contingents et pratiquerez avec pour but le refuge ultime du bouddha.

– Ayant pris refuge dans le dharma dont la nature est non-passion, non-agressivité, vivant en accord avec cette non-agressivité vous devez ne pas nuire aux autres. Donc, autant que vous le pourrez, vous abandonnerez tout ce qui pourrait nuire à d’autres êtres et pratiquerez dans l’esprit du dharma.

– Ayant pris refuge en le sangha, la communauté de ceux qui aspirent à l’éveil, il ne faudrait pas tomber sous l’influence de “mauvais amis” qui tendraient à vous faire abandonner la pratique du dharma. Donc, autant que vous le pourrez, vous abandonnerez ces “mauvais amis” et rechercherez la compagnie du sangha.

Les conseils généraux sont en rapport avec la pratique :

Il s’agit d’apprendre à honorer les Trois joyaux : par des offrandes, quotidiennes et lors d’occasions particulières ; les dédicaces faites lors des repas en sont un exemple.

Surtout il faut garder le refuge présent en vous. Aussi apprendrez-vous à prendre refuge autant que vous le pouvez. Particulièrement vous allez essayer, autant que vous le pourrez, de réciter la formule du refuge, au moins sept fois par jour.

Il y en a de nombreuses versions que nous utilisons suivant les pratiques que nous faisons, mais pour commencer vous pouvez utiliser celle que nous avons citée précédemment 1 :

« Je vais pour refuge vers le bouddha,
suprême parmi les hommes,
Je vais pour refuge vers le dharma,
suprême liberté de passion
Je vais pour refuge en le sangha.,
suprême de toutes les assemblées. »

ou encore :

« En le bouddha, le dharma, le sangha,
jusqu’à l’éveil, je prends refuge.
puissé-je réaliser bouddha
pour le bien de tous les êtres. »

On utilisera le rappel qu’est cette récitation du refuge chaque fois que l’on le pourra, et particulièrement lorsqu’on ressentira le besoin d’une inspiration et souhaitera tourner son esprit vers l’éveil.

Tout ces conseils peuvent se ramener à celui de pratiquer le dharma autant que l’on le peut, en en découvrant de plus en plus le sens et la profondeur par l’étude et l’expérience de la méditation.

Conclusion de la cérémonie

Pour terminer la cérémonie du refuge, vous faites, comme au début, trois prosternations, cette fois-ci en signe de remerciement et de gratitude pour le refuge reçu. Puis, vous resterez debout devant le lama (4) qui va exprimer le souhait que, sur la base du refuge que vous avez reçu, vous progressiez sur la voie, suiviez sa discipline sans obstacles et la meniez jusqu’à son terme. Dans une attitude d’esprit d’ouverture et d’aspiration, vous participez à ces souhaits du plus profond de vous-même et, simultanément, les formulez intérieurement.

Bienvenue dans le Dharma et meilleurs vœux de réalisation !

1Pour faire une prosternation, nous nous inclinons en plaçant tout d’abord nos mains au niveau du front, puis de la gorge, puis du cœur. Ces trois attouchements expriment, d’une part, les respects de notre corps, de notre parole et de notre esprit, et, d’autre part, notre aspiration vers le Corps, la Parole et l’Esprit du bouddha ou encore vers ses trois corps, respectivement : le nirmanakâya, le sambhogakâya et le dharmakâya. Puis, cinq points de notre corps (le front, les deux mains et les deux genoux) vont toucher le sol ; c’est le symbole de l’abdication des cinq constituants de notre individu qui sont “mis à terre”, et c’est en même temps le geste d’ouverture aux cinq sagesses.

Ainsi, globalement, on se vide de son ego et, en se vidant, on se remplit des qualités éveillées : nos corps, parole et esprit prennent la direction des Corps, Parole et Esprit du bouddha et les cinq constituants de l’ego prennent la direction des cinq sagesses de l’éveil.

2Pendant les répétitions on met le genou droit au sol et joint les mains dans le mudra de la prière qui exprime l’union : de notre esprit à celui de tous les bouddhas, et aussi de l’amour compassion et de la sagesse.

3Il est porté autour du cou un certain temps, puis l’on en dispose respectueusement.

4On se tient alors dans une posture d’écoute respectueuse, qui consiste a garder les mains au niveau du ventre, la droite recouvrant la gauche.

 

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