La perfection de connaissance transcendante

La perfection de connaissance transcendante

Gampopa

 

Le chapitre XVII du Dhagpo Thargyen, dont nous publions ici de larges extraits, expose clairement les principes intellectuels de la connaissance transcendante, ainsi que les fondements de l’approche méditative qui permet de la réaliser. Ce texte a été composé par Gampopa et sert, depuis lors, de manuel pratique du Bouddha-Dharma pour les pratiquants de la lignée kagyupa. Le Dhagpo Thargyen a été traduit en français par le comité Lotsawa et sera prochainement édité dans son intégralité.

Chapitre XVIIème du Dhagpo Thargyen :

La perfection de la connaissance transcendante

Le Résumé *  dit :

Réflexion sur les bienfaits de sa présence et les méfaits de son absence, essence, classification, caractéristiques de chaque classe, compréhension, entraînement, et résultat ; ces sept points résument la perfection de la connaissance transcendante.

 

I. REFLEXION SUR LES BIENFAITS [DE SA PRESENCE] ET LES MEFAITS [DE SON ABSENCE]

Pratiquer seulement les cinq premières paramita emprisonne dans le samsara

Tous les bodhisattvas qui habitent dans les perfections, depuis celle du don jusqu’à celle de la méditation, mais manquent de connaissance transcendante, n’obtiendront pas l’état d’omniscience car ils sont comme une foule d’aveugles qui, sans guide, ne peut faire le voyage vers la cité de leurs souhaits.

Comme le dit le Résumé des Nobles :

Comment sans guide des millions d’aveugles pourraient-ils

Entrer dans la cité dont ils ne connaissent pas même le chemin ?

Sans la connaissance transcendante, les cinq premières perfections

N’ont pas d’yeux ; sans ce guide, elle ne peuvent atteindre l’éveil.

La connaissance transcendante transforme toutes les paramita en voie vers l’omniscience

Par contre, si ces bodhisattvas ont la connaissance transcendante, elle sera leur guide et dirigera la foule d’aveugles qu’ils étaient vers la cité [de l’éveil]. Elle transformera toutes leurs vertus, celle du don et des autres perfections en une voie vers l’état de bouddha et ils arriveront à la citadelle de l’omniscience.

Dans l’introduction à la voie du milieu, il est dit :

Comme quelqu’un qui voit peut facilement diriger

Toute une foule d’aveugles vers le lieu qu’ils désirent [atteindre] ;

De même, la connaissance transcendante prend les qualités aveugles

Pour les diriger vers l’état des Victorieux.

 

Et dans le Résumé des Nobles :

 

La connaissance transcendante fait connaître complètement la nature des phénomènes

Et transcender parfaitement les trois états d’existence.

Pratiquer seulement la connaissance transcendante est s’emprisonner en nirvana partiel

— Dans ce cas, la connaissance transcendante seule ne suffirait-elle pas ?, et à quoi bon les moyens d’actions que sont le don et les autres perfections ?

—  Sachez que, seule, la connaissance transcendante ne suffit pas.

 

Dans le Flambeau de la voie de l’éveil, il est dit :

 

Il fut enseigné que l’on restera emprisonné,

Que ce soit dans la connaissance transcendante sans moyens d’actions

Ou dans les moyens d’actions sans connaissance transcendante.

Aussi ne faut-il délaisser ni l’une ni les autres.

 

— Comment une pratique où moyens d’actions et connaissance transcendante sont dissociés est-elle un emprisonnement ?

 

— Les bodhisattvas dont la pratique repose sur la connaissance transcendante dépourvue des moyens d’actions s’emprisonnent, en tombant dans le nirvana partiel de la paix que les shravaka désirent, et ils n’atteindront pas le nirvana sans demeure. La tradition qui affirme l’existence de trois véhicules [distincts] considère que cet emprisonnement est perpétuel ; alors que celle qui envisage un seul véhicule (divisé en trois niveaux) considère qu’il dure trois millions de kalpa.

D’autre part, ceux qui utilisent les moyens d’actions coupés de la connaissance transcendante ne dépassent pas le niveau des êtres ordinaires, et restent prisonniers du samsara.

Dissocier moyens d’action et connaissance transcendante est une conduite « diabolique »

Ceci est exprimé dans le Sutra des questions de Lodreu Missépa :

La connaissance transcendante dépourvue des moyens d’actions emprisonne dans le nirvana. Et les moyens d’actions dépourvus de connaissance transcendante emprisonnent dans le samsara. [Pour la libération], il faut qu’ils soient conjoints.

 

Il est dit aussi dans le Sutra exposé par le noble Pagpa Drimamépar Dragpa :

 

Qu’est-ce qui emprisonne les bodhisattvas et qu’est-ce qui les libère ? Sans moyens d’actions, la connaissance transcendante les emprisonne, jointe à ceux-ci, elle les libère ; sans connaissance, les moyens d’actions les emprisonnent, joints à celle-ci, ils les libèrent.

 

C’est pourquoi une pratique dissociant moyens d’actions et connaissance transcendante est une conduite « diabolique ».

 

Ce qu’exprime le Sutra des questions de Lugyalpo Gyamtso :

 

Les conduites diaboliques sont deux : celles des moyens d’actions dissociés de la connaissance transcendante et celles de la connaissance transcendante dépourvue des moyens d’actions. Connais-les comme l’activité de Mara et abandonne-les.

 

Pour prendre un exemple :

Ceux qui veulent aller dans une cité désirée doivent, pour y arriver, avoir des yeux qui discerneront la route et des jambes qui parcourront le chemin. Pareillement, pour arriver à la cité du nirvana sans demeure, il faut avoir l’œil de la connaissance transcendante et les jambes des moyens d’actions.

 

Le Sutra de Gayagori dit :

 

Globalement, le chemin du mahayana se résume en deux points : les moyens d’actions et la connaissance transcendante.

La connaissance transcendante n’apparaît pas seule, elle a besoin des autres perfections

La connaissance transcendante n’apparaît pas seule.

Considérons une analogie :

Si l’on enflamme un tout petit peu de bois, le feu ne durera pas longtemps ; par contre, si l’on amasse beaucoup de bois très sec et l’embrase, le feu durera longtemps sans s’éteindre. De même, peu de bienfaits accumulés ne donneront pas naissance à la grande connaissance transcendante, alors que de grands bienfaits accumulés par le don, la discipline et les autres perfections feront apparaître la grande connaissance transcendante qui consume tous les voiles. Ainsi, faut-il prendre appui sur le don et les autres perfections afin d’arriver à la connaissance transcendante

C’est ce qu’exprime L’introduction à la vie de bodhisattva :

Tous ces éléments [les cinq premières perfections] ont été enseignés par le Bouddha afin d’arriver à la connaissance transcendante.

II. L’ESSENCE DE LA CONNAISSANCE

L’essence de la connaissance est discernement parfait de tout connaissable, tout dharma

 

C’est le discernement parfait de tout connaissable (1).

Il est dit dans le Compendium de la réalité :

Qu’est-ce que la connaissance transcendante ?

C’est le discernement parfait des dharma.

III. LA CLASSIFICATION DE LA CONNAISSANCE

Connaissances mondaine, supramondaine inférieure, supramondaine supérieure

Dans le Commentaire de l’ornement des sutras, trois types de connaissance sont mentionnés :

• La connaissance mondaine,

• La connaissance supramondaine inférieure,

• La connaissance supramondaine supérieure.

IV. LES CARACTERISTIQUES DE CHAQUE CLASSE

La connaissance mondaine est celle des sciences : médecine, logique, lettres et beaux-arts

• La connaissance mondaine consiste en toutes les connaissances développées dans le cadre des quatre sciences traditionnelles : la médecine, la logique, les lettres et les beaux-arts.

Les deux connaissances supra-mondaines sont nommées « science de l’intériorité »

• Les deux connaissances supra-mondaines sont nommés « science de l’intériorité » : ce sont les connaissances dont le développement est fondé sur le saint Dharma :

La connaissance supra-mondaine inférieure est celle du non-ego

• La connaissance supra-mondaine inférieure est la connaissance issue de l’étude, de la réflexion et de la méditation que font les shravaka et pratyekabuddha : c’est la compréhension que les agrégats qui nous constituent sont impurs, douloureux, impermanents et dépourvus d’entité-ego (2).

La connaissance supra-mondaine supérieure est celle de la vacuité de tout connaissable

• La connaissance supra-mondaine supérieure est développée par l’étude, la réflexion et la méditation dans le mahayana ; c’est la compréhension que tous les connaissables sont par nature vacuité, incréés, sans fondement ni racine (3).

Ce qu’exprime la Perfection de connaissance transcendante en sept cents stances :

Cette connaissance comprend tout connaissable comme incréé ; elle est perfection de la connaissance transcendante.

Voir que tout connaissable est par nature vacuité, incréé, sans fondement ni racine

C’est ce qu’exprime aussi le Résumé des Nobles :

Connaître à la perfection tout connaissable comme étant dépourvu de nature propre,

Est l’expérience de la sublime perfection de la connaissance transcendante.

Et aussi le Flambeau de la voie de l’éveil :

 

Réaliser qu’agrégats, éléments et domaines

Ne sont pas engendrés,

Connaître leur nature vide,

Est l’explication parfaite du terme

« Connaissance transcendante ».

V. LA COMPREHENSION DE LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTE

Parmi les trois types de connaissance qui existent, celle qu’il nous faut comprendre est la connaissance supra-mondaine supérieure, aussi appelée connaissance transcendante (4). Son explication va être développée en six points :

A. La réfutation de l’appréhension des choses comme réelles (5),

B. La réfutation de l’appréhension de l’irréalité des choses,

C. Les méfaits de cette appréhension de l’inexistence,

D. Les méfaits de ces deux appréhensions,

E. La voie de la libération,

F. La nature de la libération : le nirvana.

A. LA REFUTATION DE L’APPREHENSION DES CHOSES COMME REELLES

1. La réfutation de l’entité-ego-personnel

1) L’entité-ego ne se crée ni n’est créée.

a) L’entité-ego ne se crée pas par elle-même.

b) Elle n’est pas créée par quelque chose qui lui est autre.

c) Elle n’est pas créée par une combinaison de ces deux possibilités.

d) Elle n’est pas créée [dans le cadre] des trois temps.

2) L’entité-ego est introuvable

a) Dans le corps

b) Dans l’esprit

c) Dans le nom

2. La réfutation de l’entité-phénomène

1°) L’inconsistance des objets extérieurement appréhendés

a) L’autorité des écrits

b) Le raisonnement logique

c) Les exemples

2°) L’inconsistance de l’esprit qui intérieurement appréhende

a) Examen de l’esprit dans l’instant

b) Invisibilité de l’esprit.

c) Inconsistance des objets, inconsistance de l’esprit.

B. LA REFUTATION DE L’APPREHENSION DE L’IRREALITE DES CHOSES

C. LES MEFAITS DE L’APPREHENSION DE L’EXISTENCE

D. EXPLICATION DES MEFAITS DE CES DEUX APPREHENSIONS [D’UNE REALITE ET D’UNE IRREALITE]

 

Appréhender ce monde semblable au mirage comme existant ou inexistant est l’ignorance

En fait, l’appréhension de l’existence [de choses réelles] comme de l’inexistence [ou de l’irréalité] sont toutes deux défectueuses car elles nous font tomber dans les extrêmes de l’éternalisme et du nihilisme.

 

Dans la Racine de la connaissance transcendante, il est dit :

 

L’existence [d’une réalité] est la perspective éternaliste;

L’inexistence [ou irréalité] est la perspective nihiliste.

 

Ce que dit La précieuse guirlande :

 

Appréhender ce monde semblable au mirage

Comme existant ou inexistant est l’ignorance ;

Et celui qui est dans l’ignorance

Ne sera libéré.

E. EXPLICATION DE LA VOIE DE LA LIBERATION

Sans demeurer dans l’éternalisme et le nihilisme, c’est la voie du milieu qui nous libère

— Mais alors, qu’est-qui nous libèrera ?

— Sans demeurer dans les extrêmes [de l’existence ou de l’inexistence], c’est la voie du milieu qui nous libèrera.

 

Il est dit dans La précieuse guirlande :

 

Connaître parfaitement l’ainsité ultime

Sans prendre appui sur le dualisme nous libèrera.

« L’ainsité ultime » [signifie que] tous les phénomènes sont à jamais incréés.

« Le dualisme » est la double perspective : éternaliste et nihiliste.

« La libération » est la libération du samsara.

 

Et aussi :

 

Sans appui dualiste on est libéré.

« Les appuis dualistes » sont les déterminations éternaliste et nihiliste.

 

Et encore, dans la Racine de la connaissance transcendante :

 

C’est pourquoi le sage ne se place

Ni dans l’existence ni dans l’inexistence.

 

— Demanderiez-vous alors : quelle est cette voie du milieu qui abandonne les extrêmes ?

Ne pas concevoir de paires d’extrêmes, c’est pratiquer la voie du milieu

— Il est dit dans la Superposition des nobles Rares et sublimes :

 

Eusoung, qu’entend-on par la juste application des bodhisattvas au dharma ?

C’est leur parfaite compréhension de chaque phénomène dans la voie du milieu.

Eusoung, qu’entend-on par leur parfaite compréhension de chaque phénomène dans la voie du milieu ?

Eusoung, la permanence est un extrême ; l’impermanence est le second. Le « milieu » de ces deux extrêmes n’est ni analysable, ni montrable, ni apparent, ni connaissable en mode dualiste. Et c’est, Eusoung, ce que l’on entend par la parfaite compréhension de chaque phénomène dans la voie du milieu.

Eusoung, l’entité-ego est un extrême ; le non-ego, l’absence d’entité, est le second. Le « milieu » de ces deux extrêmes n’est ni analysable, ni montrable, ni apparent, ni connaissable en mode dualiste. Et c’est, Eusoung, ce que l’on entend par la parfaite compréhension de chaque phénomène en la voie du milieu.

Eusoung, le samsara est un extrême ; le nirvana est le second. Le « milieu » de ces deux extrêmes n’est ni analysable, ni montrable, ni apparent, ni connaissable en mode dualiste. Et c’est, Eusoung, ce que l’on entend par la parfaite compréhension de chaque phénomène dans la voie du milieu.

 

Shantideva dit aussi :

 

L’esprit n’est ni intérieur, ni extérieur, ni ailleurs.

Il est introuvable ; il n’est ni dans une combinaison

[De ces possibilités], ni nulle part en dehors.

Il n’est aucunement [signifiable] comme « tel » ;

C’est pourquoi la nature des « êtres doués d’esprit » est nirvana.

 

Ainsi, ne pas concevoir de paires d’extrêmes est pratiquer la voie du milieu ; mais ce « milieu » est lui-même inconcevable, fondamentalement dépourvu de connaissance qui appréhende comme « cela » : il se situe dans la transcendance de l’esprit conceptuel.

La perfection de connaissance transcendante se connaît dans le temps de l’équanimité

Atisha dit :

 

L’esprit passé a cessé et est révolu, l’esprit à-venir n’est ni né ni venu, quant à l’esprit présent, il est fort difficilement concevable : sans couleur, dépourvu de forme, inconsistant comme l’espace.

 

Il est dit aussi dans L’ornement de la véritable libération :

« Perfection de connaissance transcendante » car non déterminée par « l’ici » ou « l’au-delà »

On l’appelle : « perfection de connaissance transcendante »

Car elle n’est pas dans les déterminations de « l’ici » ou de « l’au-delà » (6),

Ni ne se situe entre les deux :

Elle se connaît dans le temps de l’équanimité.

F. EXPLICATION DE LA NATURE DE LA LIBERATION : NATURE DU NIRVANA

Le nirvana est la fin de tout esprit conceptuel qui appréhende une réalité ou une irréalité

 

— Si tous les phénomènes du samsara n’ont aucune consistance réelle ou irréelle, ce que l’on appelle nirvana est-il une réalité ou une irréalité ?

 

— Ceux qui ont des références [dualistes] pensent que le nirvana est une réalité. Mais ce n’est pas le cas.

« Si le nirvana était une chose réelle, le nirvana serait un composé »

La Précieuse guirlande dit :

 

Si le nirvana n’est pas une irréalité,

Comment pourrait-il être une réalité (7)?

[De plus], s’il était une chose réelle, le nirvana serait un composé (8), et s’il était composé, finalement il serait détruit.

« Si le nirvana était réel, le nirvana serait un composé »

Ainsi il est dit dans la Racine de la connaissance transcendante :

 

Si le nirvana était réel,

Le nirvana serait un composé.

 

Cela est enseigné en ces termes et en bien d’autres. Mais il n’est pas non plus irréel.

Dans ce même texte, il est dit :

 

Il n’est pas non plus [quelque chose] qui serait irréel.

 

— Mais alors, qu’entendez-vous par là ?

— La fin de tout esprit conceptuel qui appréhende une réalité ou une irréalité, cet au-delà de l’esprit conceptuel, inexprimable, est ce que l’on entend par nirvana.

 

Et aussi dans la Précieuse guirlande :

 

La fin de l’appréhension d’une réalité

Ou d’une irréalité est appelée nirvana.

 

Et dans L’introduction à la vie de bodhisattva :

 

Quand le doublet réalité-irréalité ne prend pas place

Dans l’esprit conceptuel,

Celui-ci n’a alors d’autre dichotomie, et s’apaise

Parfaitement en l’absence de références.

Le parfait nirvana est la totale disparition de tous concepts, l’absence de tout mouvement

Dans le Sutra des questions du noble Brahma , il est dit :

 

Le parfait nirvana est la complète disparition de tous concepts, l’absence de tout mouvement (9).

 

Et dans le Blanc lotus de l’enseignement sacré :

 

Eusoung, intégrer en soi l’égalité de tous phénomènes est le nirvana (10).

 

Ainsi, le nirvana est simplement la disparition de la mise en place de l’esprit conceptuel, et il ne consiste en aucune chose qui soit créée, finie, obtenue ou abandonnée, etc.

Ni abandon ni obtention ni nihilisme ni éternalisme ni cessation ni création… le nirvana

Ce qui apparaît dans la Racine de la connaissance transcendante :

 

Ni abandon, ni obtention,

Ni nihilisme, ni éternalisme,

Ni cessation, ni création,

C’est le nirvana.

« Il n’y a rien à dissiper, rien à placer ; regarde parfaitement l’ultime perfection »

Ainsi, n’ayant ni création, ni cessation, ni abandon, ni obtention, etc., n’étant pas quelque chose, il n’y a rien que ce nirvana fasse, change, ou modifie (11).

 

Ce qui est dit dans le Sutra des joyaux célestes :

 

Il n’y a rien à dissiper, rien à placer.

Regarde parfaitement l’ultime perfection :

Voir parfaitement

Libère complètement.

 

Ainsi ces mots : « connaissance transcendante » ou « connaissance de notre propre esprit », existent du point de vue des discriminations de la pensée : alors que la connaissance transcendante, le sens de l’esprit, transcende ce qui peut en être connu et ce qui peut en être dit.

La perfection de la connaissance transcendante est indicible, impensable et inexprimable

Dans le Sutra des questions de Rabkitsèlgui Namparnèn-pa, il est dit :

 

La perfection de connaissance transcendante ne peut être exprimée par aucune chose, elle est au-delà de tous les mots.

 

Et aussi dans la Louange de Dratchendzinn à la mère :

 

La perfection de la connaissance transcendante

Est indicible, impensable et inexprimable.

Elle a « l’essentialité » de l’espace, incréé et sans fin.

Elle est du domaine de la connaissance primordiale qui se connaît elle-même.

Hommage à la Mère des Victorieux des trois temps.

 

Ainsi s’achève l’explication de ce qu’il faut connaître de la connaissance transcendante.

VI. LA PRATIQUE DE LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTE

Nous allons maintenant expliquer la pratique de la connaissance transcendante et [son] esprit.

— Si tous les phénomènes sont vacuité, à quoi sert-il de pratiquer pour le savoir ?

— C’est nécessaire. Prenons un exemple :

Le minerai argentifère a la nature de l’argent, néanmoins l’argent n’apparaîtra pas aussi longtemps que le minerai n’aura pas été raffiné : si l’on veut de l’argent pur, il faut en raffiner le minerai ! De même, tous les phénomènes ont depuis toujours la nature de la vacuité au-delà de toute conception mais ils apparaissent aux êtres comme de multiples choses réelles qui leur font éprouver différentes souffrances. C’est pourquoi il est nécessaire qu’ils comprennent et pratiquent cette connaissance transcendante de la vacuité.

C’est ainsi qu’après sa compréhension, expliquée ci-dessus, sa pratique aura quatre phases :

A. : Les préliminaires.

B. : La méditation assise (12).

C. : La méditation dans l’action (13).

D. : Les signes [de succès] de la pratique.

 

 

A. LES PRELIMINAIRES

 

Assis dans un endroit isolé, non distrait et à l’aise, laisser l’esprit venir en son état naturel

 

Elle consiste à laisser l’esprit venir en son état naturel.

— Comment y vient-il ?

 

— Il est dit dans la Perfection de la connaissance transcendante en sept cent stances :

 

Fils ou Filles de la lignée, dans un endroit isolé, asseyez-vous sur un coussin et, en l’absence d’occupations distrayantes, soyez heureux, ne fabriquez mentalement aucun concept, prenez la posture, restez en place, etc.

On pratiquera ainsi et selon les pratiques préliminaires à mahamudra (14).

B. LA MEDITATION ASSISE

Demeurer détendu, libre d’effort et de contrainte, sans concevoir quoi que ce soit

Les méthodes de la méditation assise, conformément aux directives de la tradition de mahamudra, sont de demeurer libre d’effort et de contrainte, sans concevoir quoi que ce soit : ni existence, ni non existence, ni chose à pratiquer, ni chose à abandonner.

 

Ainsi Tilopa dit :

 

Sans concevoir, sans penser, sans prendre connaissance,

Sans méditer, sans analyser, reste tel quel.

 

Et dans le Repos de l’esprit :

 

Ecoute, Fils ! Quelque pensée que tu aies,

N’y lie pas le moi et ne l’en libère pas.

Pour ce faire, sans distraction, sans artifice, « laisse être ».

O merveille ! Laisse se reposer ce qui t’épuise.

« Quand l’éléphant a été apprivoisé, son esprit est stable »

Et aussi Nagarjuna :

 

Quand l’éléphant a été apprivoisé, son esprit est stable. Pareillement, quand on arrête les allées et les venues [de l’esprit], la tranquillité vient d’elle-même. Combien faut-il de dharma pour comprendre cela ?

« Sans artifice s’accomplit la nature de l’inné, c’est la voie des Victorieux des trois temps »

Il dit aussi :

 

Ne pense rien ; ne conçois rien ; ne suscite aucun artifice ;

Demeure dans la détente naturelle.

Sans artifice, s’accomplit la nature de l’inné.

Telle est la voie qu’ont suivie tous les Victorieux des trois temps.

Sans s’attacher aux expériences de chaleur ou autres, méditer sans paresse avec vigilance

Ritreu Oangtchou dit aussi :

 

Sans rien regarder comme défectueux, pratique ce qui n’est rien.

Et ne désire pas de signes qu’ils soient de chaleur (15) ou autres.

Bien qu’il soit enseigné qu’il n’y a rien à méditer,

Ne te laisse pas aller à la paresse ou à l’indifférence,

Et médite constamment avec attention.

 

Et dans la Réalisation du sens de la méditation :

Lorsqu’on médite on ne médite rien, mais au niveau conceptuel cela s’appelle méditer

Lorsqu’on médite, on ne médite rien ;

Néanmoins, au niveau conceptuel, cela s’appelle méditer.

« Abandonne tout ce à quoi tu es attaché ; lorsque c’est réalisé, c’est tout »

Et aussi Saraha :

 

Abandonne tout ce à quoi tu es attaché ;

Lorsque c’est réalisé, c’est tout.

Et au-delà de cela, il n’est personne

Qui connaisse rien d’autre.

Ultime sphère du nirvana naturel : la Claire lumière, non composée-incréée-infinie-pure…

Et Atisha :

 

Profonde et au-delà des concepts est l’ainsité.

C’est la Claire lumière, non composée, incréée, infinie.

Pure depuis toujours, l’ultime sphère du nirvana naturel,

Sans centre ni périphérie. L’œil de l’esprit non conceptuel

Ayant disparu : sans vouloir et sans pensée,

En l’absence de torpeur, d’agitation et de trouble,

Contemple-la.

 

Et aussi :

« En la sphère absolue libre de tout concept, repose, connaissant, libre de tout concept »

En la sphère absolue libre de tout concept,

Repose, connaissant, libre de tout concept.

 

Rester ainsi est la méthode juste pour pratiquer la perfection de la connaissance transcendante.

 

Ce qui est dit aussi dans la Perfection de la connaissance transcendante en sept cents stances :

 

Ni saisir, ni appréhender, ni rejeter aucune chose est méditer la perfection de connaissance transcendante. Ne se poser sur quoi que ce soit, ne pas prendre de référence conceptuelle est méditer la perfection de connaissance transcendante.

 

Et aussi dans les Huit mille stances des Nobles :

 

Cette méditation de la perfection de la connaissance transcendante est de ne méditer aucune chose.

 

Et dans ce même sutra :

Méditer la perfection de la connaissance transcendante est méditer l’espace.

— Et dans ce cas, comment méditer l’espace ?

— Il est dit dans ce même sutra :

L’absence de pensée en l’espace se compare à l’absence de pensée en la perfection de la connaissance transcendante.

 

Et aussi dans le Résumé des Nobles :

 

Ne concevoir ni création ni non-création

Est la suprême activité de la perfection de la connaissance transcendante.

« Sans penser pensée ou non-pensée, la vacuité sera vue !…  Voir la vacuité n’est pas voir »

Le Maître Ngagui Ouangtchou dit aussi :

 

Ne pense pas à penser,

Ni ne pense à ne pas penser ;

Sans penser pensée ou non-pensée,

La vacuité sera vue !

 

— Comment la vacuité sera-t-elle vue ?

— Il est dit dans le Sutra qui résume parfaitement l’enseignement :

 

Voir la vacuité n’est pas voir.

 

Aussi :

 

Le bouddha ne voit aucun phénomène ; c’est l’ultime vision.

« Ne rien voir est voir l’ainsité…  Ne pas voir est Voir… C’est ce qu’enseigne le Tathagata »

Et aussi :

 

Ne rien voir est voir l’ainsité.

 

Et encore dans le Petit traité de la voie du milieu :

 

Ne pas voir est Voir.

 

C’est ce qu’enseignent les sutras très profonds.

 

Et encore, dans le Résumé des Nobles :

 

« Voir l’espace » est, dans le vocabulaire des êtres, une excellente expression.

Qu’est-ce que « voir l’espace » ?

Examine ce que cela signifie !

Voir ainsi les choses est ce qu’enseigne le Tathagata.

C. LA MEDITATION DANS L’ACTION

Après la session, regarde tout comme une illusion et pratique le don et les autres vertus

 

Dans la méditation après les sessions, regarde tout comme une illusion, et, par le don et les autres perfections, cultive le plus possible le domaine des vertus.

 

Ce que dit le Résumé des Nobles :

 

Celui qui connaît les cinq agrégats comme étant semblables à une illusion,

Qui ne fait pas comme si illusion et agrégats étaient différents

Et qui, sans conceptualisation, agit en paix,

Celui-là est dans l’action suprême

De la perfection de la connaissance transcendante.

 

Et dans le Sutra royal du samadhi :

 

L’acteur d’illusions projette des formes :

Chevaux, bœufs, chars, et une multitude d’autres choses,

Mais ces apparences ne sont rien de ce comme quoi elles apparaissent.

Comprends que tous les phénomènes sont semblables à ces apparences.

Par cette pratique, les méditations assise et dans l’action deviendront indissociables

Et aussi dans L’ainsité de l’action :

 

Même si la non-conceptualisation est présente dans ton intellect,

N’interromps pas la pratique des vertus.

 

Ainsi, par cette pratique, les méditations assise et dans l’action deviendront indissociables, et l’on sera libre d’attitude suffisante.

 

Il est dit :

 

On n’aura pas la vanité de se dire : « je suis en absorption », ou encore : « j’en suis sorti ».

— Pourquoi cela ?

— Parce que l’on saura [que les états méditatifs : de l’absorption assise ou de la pratique dans l’action] sont dans la nature des choses.

L’instant d’absorption en l’ainsité développe plus de bienfaits qu’étudier durant des kalpa 

Rester, ne serait-ce qu’un seul instant, en cet état de la perfection de la connaissance transcendante, l’ultime vérité de la vacuité, est un bienfait incommensurablement supérieur à ceux que l’on pourrait obtenir, fût-ce pendant un cycle cosmique, en écoutant l’enseignement, en pratiquant les récitations, ou par le don et les autres sources de vertus.

 

Ce que dit le Sutra de l’exposition de l’ainsité :

 

Sharipu, celui qui médite, serait-ce le temps d’un claquement de doigts, l’absorption en l’ainsité, développe plus de bienfaits que celui qui étudie, fût-ce pendant un kalpa. C’est pourquoi, Sharipu, il faut avec insistance enseigner à autrui cette absorption en l’ainsité. Shariputra, tous les bodhisattvas prédits comme [futurs] bouddhas ne demeurent qu’en cet état.

 

Et aussi dans le Sutra du développement de la grande réalisation :

 

Rester absorbé un seul instant en la méditation juste

A plus de sens que de donner vie

Aux hommes des trois états d’existence.

 

Et aussi dans le Sutra du grand Tsouktor :

 

Une journée de méditation du sens fondamental du dharma a plus de bienfaits que de nombreux cycles cosmiques d’étude et de réflexion.

— Pourquoi cela ?

— Parce que c’est par celle-ci qu’on laisse au loin la route des naissances et des morts.

 

Et aussi, dans le Sutra de l’introduction à la confiance :

 

Le yogi qui médite durant une session sur la vacuité développe plus de bienfaits que tous les êtres des trois états d’existence ne le font, durant toute leur vie, avec des choses matérielles.

 

Si le sens fondamental de la vacuité n’est pas en notre esprit, il fut enseigné que ce ne sont pas les autres vertus qui nous délivreront de l’ego.

« Qui connaît le dharma de la non-existence jamais ne s’attache à aucun dharma »

Il est dit dans le Sutra qui expose la non-apparition des phénomènes :

 

Garderait-on longtemps la discipline

Et pratiquerait-on la méditation pendant un million de cycles cosmiques,

Si l’on ne réalise pas cette ultime conclusion,

Ces pratiques de l’enseignement ne nous libèreront pas.

Qui connaît le dharma de la non-existence jamais ne s’attache à aucun dharma.

Coupe court aux doutes en pratiquant la méditation, il n’y a rien d’autre qui puisse le faire

Et dans le Dixième cycle de Saïnyingpo :

 

Coupe court aux doutes en pratiquant la méditation ;

Il n’y a rien d’autre qui puisse le faire,

C’est la raison pour laquelle elle est suprême,

C’est pourquoi les sages y persévèrent.

 

Et aussi dans le même texte :

 

Il y a plus de bienfaits à méditer pendant une journée qu’il n’y en a à écrire, écouter, expliquer et réciter les enseignements pendant un cycle cosmique.

 

– Si l’on a la réalisation du sens fondamental de la Vacuité, il n’y a aucun enseignement qui n’y soit inclus :

– C’est prendre refuge

Prendre refuge en le dharma avec un esprit sans matérialisme, en la sphère absolue

Il est dit dans le Sutra des questions de Madreupa :

 

Les bodhisattvas connaissent tout phénomène comme étant dépourvu d’entité, d’être, de principe vital, et de personne. Ils sont ainsi en parfaite concordance avec la non-vision des Tathagata pour qui il n’est ni forme, ni caractéristique, ni chose. C’est ainsi qu’ils prennent refuge en le bouddha avec un esprit sans matérialisme.

La nature essentielle du Tathagata est la sphère absolue. La sphère absolue est dite concorder avec la totalité des phénomènes. [Les bodhisattvas] voient que tous les phénomènes concordent avec la sphère absolue. C’est dans une telle vision qu’ils prennent refuge en le dharma avec un esprit sans matérialisme.

Pour ceux qui méditent la sphère absolue comme non composée ou qui dans la voie des shravaka s’appuient sur la non composition, ne pas faire de dualisme entre composé et non composé, est prendre refuge en le sangha avec un esprit sans matérialisme (16).

L’état de l’esprit d’éveil est aussi de voir tout phénomène comme la Claire lumière

– C’est aussi l’état de l’esprit d’éveil

 

Il est dit dans le Sutra du grand état d’esprit éveillé:

 

Eusoung, tous les phénomènes, dépourvus de caractéristiques comme l’espace, sont depuis toujours la claire lumière parfaitement pure. C’est ce que l’on appelle l’état de l’esprit d’éveil (bodhicitta).

 

– Que l’on médite sur une divinité (17), dans la phase d’élaboration, ou que l’on récite des mantra (18), si l’on a [la réalisation de la vacuité], ils sont dits y être aussi inclus.

« C’est par l’effort parfait en l’état de l’esprit d’éveil que l’état d’union deviendra Dieu »

Le Tantra d’Hevajra dit :

 

Sans méditation, il n’est pas non plus de méditant,

Ni de Dieu, ni de mantra.

Mais [en la nature de l’esprit non conceptuel],

Dieu ou mantra résident parfaitement :

[Que ce soit] Vairocana, Akshobya, Amogasiddhi, Ratnasambhava ou Amithaba (19).

 

Et dans L’union au bouddha :

 

L’état d’union ne vient pas des images,

Statues, et autres [représentations] ;

C’est par l’effort parfait en l’état de l’esprit d’éveil

Que l’état d’union deviendra Dieu.

La caractéristique essentielle de tout mantra est d’accomplir l’essence du dharma

Et aussi, dans le Sommet adamantin :

 

La caractéristique essentielle de tout mantra

Est celle de l’esprit de tout bouddha :

Ils accomplissent l’essence du dharma.

Conférer parfaitement [la réalisation de} la sphère absolue est dit

Etre la caractéristique de tous les mantra.

La pratique du don au feu confère le suprême accomplissement en brûlant les conceptions

– La pratique du don au feu (20) y est aussi incluse.

 

Il est dit dans le Tantra roi du nectar secret :

 

Quelle est la raison du don au feu ?

Le don au feu confère le suprême accomplissement

Et soumet la pensée conceptuelle.

Brûler du bois et d’autres choses

N’est pas le don au feu.

 

– La voie des six perfections y est aussi incluse.

« Ne pas quitter la vacuité inclut les six perfections »

Ainsi, dans le Sutra de l’absorption adamantine :

 

Ne pas quitter la vacuité

Inclut les six perfections.

 

Et aussi, dans le Sutra des questions de Tasangpa Kyéparsèm :

 

Ne pas penser est le don ; ne pas rester dans la discrimination est la discipline ; ne pas particulariser est la patience ; ne pas prendre et rejeter est l’effort ; le non-attachement est la méditation ; la non-conception est la connaissance transcendante.

 

Et dans le Sutra de Saïnyingpo :

 

Les sages méditent le dharma de la vacuité :

Ils ne s’appuient, ni ne se posent sur rien du samsara,

Ne se reposent sur aucune existence et gardent [ainsi]

La discipline de la parfaite vertu.

 

Et dans ce même texte :

Quand tous les phénomènes ont l’unique saveur de la vacuité, l’esprit ne s’attache à rien

Lorsque tous les phénomènes ont la même unique saveur :

Vide et sans caractéristique,

L’esprit ne se fixe ni ne s’attache à rien,

Et une telle patience a d’immenses bienfaits.

Les efforts persévérants des sages

Consistent à laisser au loin tout attachement

Et à prévenir toute fixation de l’esprit !

C’est ce que l’on appelle l’ultime domaine de la vertu.

Pour le bien et le bonheur de tous les êtres,

Pratiquer la méditation et abandonner ce qui est oppressant, en dissipant toutes les passions,

Est la caractéristique du parfait sage.

Les pratiques d’hommage et d’offrande sont aussi la connaissance transcendante

 

– Les pratiques d’hommage sont aussi [cette connaissance transcendante].

 

Il est dit dans le Sutra des joyaux célestes :

 

Comme l’eau qui reste dans l’eau, ou l’huile dans l’huile ;

La vision parfaite de cette connaissance primordiale

Qui se connaît elle-même est hommage.

 

– Si l’on a cette [connaissance transcendante], elle est aussi offrande.

 

Ainsi le Sutra de la rencontre du père et du fils dit :

 

Supportée par le dharma de la vacuité,

Toute aspiration tournée vers le domaine de la bouddhéité

Est offrande au bouddha :

Cette offrande est insurpassable.

« Purifier justement notre propre esprit est la grande offrande satisfaisante »

Et dans le Tantra roi du nectar secret :

 

L’offrande qui satisfait fondamentalement

N’est pas faite en adressant encens ou autres !

Purifier justement notre propre esprit

Est la grande offrande satisfaisante.

« Voir parfaitement l’ultime est suprêmes contrition et purification »

– Aussi, si l’on a cette [connaissance transcendante], elle est la confession des actes négatifs.

 

Ainsi est-il dit dans le Sutra de la parfaite purification des actes :

 

Celui qui désire se confesser

Se tiendra droit et regardera l’ultime :

Voir parfaitement l’ultime

Est suprêmes contrition et purification.

Cette perfection de connaissance inclut aussi la discipline des vœux et liens initiatiques

– Le sens de cette [perfection de connaissance transcendante] inclut aussi le fait de garder vœux et liens initiatiques.

 

Ainsi le Sutra des questions de Lhaï-pou  dit :

 

Ne pas avoir la présomption d’être ou de ne pas être lié à des vœux est la discipline du nirvana : c’est la discipline parfaitement pure.

« Celui qui a réalisé la vacuité des Nobles, celui-là, je le dis moine en l’ultime vérité »

Et aussi, dans le Sutra du dixième cycle :

 

Habiterait-il chez lui sans se raser la tête ni la barbe, sans porter la robe du dharma et sans se tenir à la discipline, celui qui a [réalisé] la vacuité des Nobles, celui-là, je le dis moine en l’ultime vérité.

En la perfection de connaissance transcendante, il n’est de perspective exprimable

– Ce sens de [la perfection de connaissance transcendante] est aussi celui de l’écoute, la réflexion et la méditation.

 

Le Tantra de la parfaite non-demeure dit :

 

Celui qui a goûté à la nourriture de l’esprit naturel sans artifice,

Est rassasié de toutes perspectives philosophiques quelles qu’elles soient.

Le vulgaire s’appuie sur des mots et des concepts qu’il ne réalise pas

Et qui sont tous des désignations de son propre esprit.

 

Saraha dit aussi :

 

Elle est lecture, elle est compréhension, et elle est méditation, mais ne consiste pas à retenir des textes : il n’est en elle de perspective exprimable.

Le sens de cette perfection de connaissance est aussi celui d’activités religieuses (torma)

– Le sens [de cette perfection de connaissance transcendante] est aussi celui d’activités religieuses, comme l’offrande de torma (21).

 

Le Tantra roi du nectar secret  dit :

 

Sois certain que tous les faits et gestes rituels :

Offrandes, torma et autres

Font découvrir l’ainsité de l’esprit

Et y sont tous résumés.

« Les différentes méthodes de l’enseignement ont été exposées aux ignorants »

— Puisque toutes ces pratiques se ramènent à la seule méditation de l’essence ou de l’esprit-même, pourquoi les nombreuses progressions méthodiques sont-elles enseignées ?

— Elles le sont pour diriger les vulgaires, ignorants du mode d’être essentiel  de l’esprit.

 

C’est ce que dit le Sutra de l’ornement de la lumière de connaissance primordiale :

« Dans l’ultime vérité… que pourrait-il y avoir qui soit à pratiquer progressivement ? »

Les différentes méthodes de l’enseignement ont été exposées aux ignorants

Pour leur expliquer la vérité des causes et des facteurs

Et leur exposer une progression graduelle.

Dans l’ultime vérité qui subsiste par elle-même,

Que pourrait-il y avoir qui soit à pratiquer progressivement ?

 

Dans L’apparition du lien de Dèmtcho, il est dit :

 

Une telle nature qui est semblable à l’espace

Est une nature qui est éternellement libre.

 

Et dans le Sutra des joyaux célestes :

 

Aussi longtemps que l’on n’est pas allé dans l’océan de la sphère absolue, les degrés et chemins spirituels sont distincts ; alors qu’une fois que l’on y est, il n’y a plus de parcours : ni degré ni voie.

 

Et aussi Atisha :

 

Lorsque ton esprit s’adonne complètement à la méditation,

Ne fais pas des vertus physiques et mentales l’essentiel !

D. LES SIGNES [DE SUCCES] DE LA PRATIQUE DE LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTE

« S’étant habitué à la pratique de la vacuité, on devient attentif aux vertus, etc… »

On devient attentif à la vertu ; les passions décroissent ; de la compassion naît pour les êtres ; on est persévérant dans sa pratique, on abandonne toutes les distractions et, sans se lier à cette vie, on devient libre d’attachement.

 

C’est ce que dit La précieuse guirlande :

 

S’étant habitué à la pratique de la vacuité,

On devient attentif aux vertus.

Et caetera.

VII. LES RESULTATS DE LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTE

On distinguera : son résultat ultime et ses résultats transitoires.

A. L’ULTIME RESULTAT

C’est l’obtention de l’insurpassable éveil

 

Ce que dit la Connaissance transcendante en sept cents stances :

 

Manjushrı, en pratiquant la perfection de connaissance transcendante, les grands bodhisattvas rapidement s’éveilleront totalement à l’insurpassable, parfait et complet éveil.

B. LES RESULTATS TEMPORAIRES

Ce sont l’apparition de tous les bonheurs excellents

 

Il est dit dans le Résumé des Nobles :

 

Toutes les qualités de bonheurs et de bien-être qui existent :

Que ce soient celles des bouddhas, des bodhisattvas, des shravaka,

Des pratyekabuddha, des dieux, ou de tous les êtres,

Toutes viennent de la suprême perfection de la connaissance transcendante.

 

 

Ainsi s’achève la section consacrée à la perfection de la connaissance transcendante, chapitre dix-septième du Joyau d’abondance du dharma, le précieux ornement de la libération.

 

 

Notes au texte français

(1) Le mot traduit ici par connaissable aurait aussi pu être traduit par phénomène. Connaissable a un champ sémantique plus large que phénomène car certains connaissables dépassent les phénomènes de la manifestation du samsara. La définition du mot tibétain original a été donnée dans le n°1 de Dharma.

 

(2) Une entité est un tout qui se suffit à lui-même, qui est autonome et donc indépendant et permanent. La doctrine bouddhique d’anatman, enseigne que notre expérience empirique de telles entités n’a qu’un caractère relatif et fondamentalement illusoire ; que tous les phénomènes de notre expérience sont vides de telles entités.

 

(3) Les connaissables sont incréés dans le sens où leur genèse comme leur existence est illusoire. Une création vraie serait celle d’une entité par une autre entité ; mais un tel engendrement est logiquement contradictoire, et donc les phénomènes sont, en ce sens, incréés ou non produits. Cette non-création des phénomènes est synonyme de vacuité ; mais, bien que vides, ils existent en apparence dans le jeu des interrelations de facteurs connexes.

 

(4) Comme il vient d’être expliqué précédemment, cette connaissance supra-mondaine supérieure est le point culminant de la connaissance. On l’appelle aussi connaissance transcendante car c’est la connaissance directe et immédiate qui transcende les conditionnements illusoires du samsara et nous en libère. Elle transcende l’ego, ses illusions, la dualité du moi et de l’autre, et débouche sur une expérience directe et immédiate qui dépasse toutes les perceptions d’entités et les identifications.

Dans la suite de notre texte, nous avons traduit « chérab » en tant que connaissance supra-mondaine supérieure par l’expression « connaissance transcendante ».

 

(5) L’appréhension de choses réelles, ou appréhension réaliste, est cette saisie qui appréhende les objets comme étant vrais, comme étant une réalité ayant une existence autonome et indépendante.

Le terme traduit par appréhension peut aussi l’être par saisie, fixation, ou conception. Conception rend compte à la fois de l’opération consistant à concevoir, et du produit de cette opération : la pensée et ses concepts.

 

 (6) « L’ici et maintenant » et « l’au-delà-après », « ce côté-ci », « ce côté-là », le moi et l’autre, etc. sont des couples de significations impliquées au sens large dans l’expression tibétaine ; elles existent toutes en détermination réciproque : l’une se posant en s’opposant à l’autre (et réciproquement).

 

(7) Le nirvana est conventionnellement considéré comme l’ultime réalité ; a priori, il n’est donc pas une irréalité !

Mais les termes : réalité et irréalité n’existant qu’en détermination réciproque (voir note 40), nier un des deux extrêmes supprime la possibilité de l’autre et l’existence de leur couple : sans irréalité, il n’est donc de réalité.

 

(8) Il n’est pas de chose réelle qui soit non composée, c’est-à-dire qui existe hors de l’interdépendance des différents éléments qui la composent.

Tout ce qui est composé est transitoire, soumis à la décomposition, impermanent : cette impermanence serait contradictoire avec la nature incréée du nirvana.

 

(9) En l’absence des repères par rapport auxquels ils se définissent, il n’est de mouvement (spatial ou temporel) ou même de changement qualitatif ou quantitatif. Il n’est non plus de transition, de méditation, de modification, ni de transformation.

 

(10) L’égalité de tous les phénomènes est dans leur unique essence comme vacuité par delà les différenciations et discriminations conceptuelles ; elle est le lieu de l’espace sans centre ni périphérie, et du temps sans avant ni après.

 

(11) voir note (9).

 

(12) Le terme technique tibétain (samadhi en sanscrit) désigne d’une façon générale la méditation assise. Néanmoins, on pourrait le rendre littéralement par « méditation en absorption équanime » ou encore par « positionnement régulateur », ou « unificateur » de l’esprit, « absorption régulatrice », etc.

 

(13) C’est la pratique méditative faite comme extension de la méditation assise et après ses sessions. Littéralement, on pourrait traduire le terme par « méditation subséquente ».

 

(14) Les pratiques préliminaires à mahamudra préparent le postulant à la transmission essentielle de ces enseignements. Après des préliminaires dits ordinaires consistant en la réflexion sur :

– La précieuse existence humaine

– L’impermanence et la mort

– La causalité du karma

– Le caractère insatisfaisant des existences conditionnées,

ils abordent les préliminaires spéciaux :

– La pratique de prosternations rituelles associées au refuge et à bodhicitta,

– La pratique de purification par la méditation de Dordjé Sempa,

– La pratique d’offrande du mandala,

– La pratique d’union au Lama : Lamé-Neldjor

Après ces préliminaires, la transmission juste de mahamudra peut avoir lieu. Pour plus de détails, consulter Le Mahamudra qui dissipe les ténèbres de l’ignorance, qui est un manuel de méditation composé par Ouangtchouk Dordjé, le neuvième Karmapa, éditions Yiga Tcheu Dzin, 71320 Toulon sur Arroux.

 

(15) Les signes de chaleur sont des expériences physique et spirituelle de « chaleur » qui apparaissent à un niveau avancé, comme signe de succès dans la pratique.

 

(16) Tous les phénomènes sont composés mais la sphère absolue est non composée. Ce dualisme est dépassé dans la réalisation de la vacuité.

 

(17) La divinité sur laquelle on médite est l’Esprit-pur envisagé sous un aspect personnel correspondant à une qualité connaissable de l’ultime informel

 

(18) Un mantra est une formule, généralement courte, qui peut être considérée comme une forme archétypale de prière. Elle évoque généralement le nom de la Divinité ou ses attributs essentiels, et sa répétition ouvre notre esprit à sa grâce et à leur présence.

 

(19) C’est le nom des cinq Victorieux, les cinq Bouddhas principiels, expressions des cinq aspects de la connaissance primordiale ou des cinq facettes de la bouddhéité.

 

(20) Le don au feu est une pratique spéciale du vajrayana dans laquelle différentes offrandes, supports rituels, sont offerts au feu divin de la connaissance primordiale.

 

(21) Les torma sont de petites effigies utilisées comme supports d’offrandes rituelles.

 

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