Aimer, c’est être là

Vénérable Thich Nath Hanh

La sensitivité, c’est aussi être pleinement présent à l’autre dans une entière disponibilité et un accueil sans jugement ni projection : ouvrir son cœur pour vraiment entendre. Etre là, simplement écouter, est très précieux, quelque chose de simple auquel nous sommes confrontés à chaque instant mais peut-être n’avons-nous pas toujours les clefs de cette sagesse. Voici les quatre mantras de la pratique de l’amour véritable

Être là pour l’autre… et l’aimer, simplement…

Selon le bouddhisme, il y a quatre composantes de l’amour véritable. Maitrî, qui peut se traduire par bonté aimante, bienveillance. La bonté aimante n’est pas seulement la volonté de rendre une personne heureuse, d’offrir de la joie à cette personne aimée. C’est la capacité d’offrir de la joie, du bonheur, à la personne que vous aimez ; car même si vous avez l’intention de l’aimer, votre amour peut faire souffrir cette personne. Il faut de l’entraînement pour pouvoir aimer correctement ; et pour pouvoir offrir du bonheur, de la joie, vous devez pratiquer le regard profond dirigé vers cette personne là. Parce que si l’on ne comprend pas la personne, on ne peut pas l’aimer correctement. La compréhension est l’essence de l’amour. Si l’on ne peut pas comprendre, on ne peut pas aimer. Tel est le message du Bouddha. Si le mari, par exemple, ne comprend pas les difficultés les plus profondes de sa femme, son aspiration la plus profonde, s’il ne comprend pas sa souffrance, il ne pourra pas l’aimer comme il faut. Sans compréhension, I’amour n’est pas une chose possible.

Comment faire pour comprendre une personne ? Il faut avoir du temps, il faut pratiquer le regard profond dirigé vers cette personne. Il faut être là, attentif, il faut observer, il faut regarder. Et le fruit de ce regard profond s’appelle la compréhension. L’amour est une chose véritable s’il est fait d’une substance appelée compréhension.

La deuxième composante de l’amour véritable est la compassion : karunâ. Ce n’est pas seulement la volonté de soulager la douleur chez une autre personne, mais la capacité de le faire. Il faut pratiquer le regard profond pour bien comprendre la nature de la souffrance de cette personne, afin de pouvoir l’aider à se transformer. La connaissance, la compréhension sont toujours à la base de la pratique. La pratique de la compréhension, c’est la pratique de la méditation. Méditer, c’est regarder profondément dans le cœur des choses.

La troisième composante de l’amour véritable, c’est la joie : muditâ. S’il n’y a pas de joie dans l’amour, il ne s’agit pas d’amour véritable. Si l’on souffre tout le temps, si l’on pleure tout le temps et si l’on fait pleurer celui ou celle que l’on aime, ce n’est pas véritablement de l’amour, c’est même son opposé. Si dans votre amour il n’y a pas de joie, vous pouvez être certain qu’il ne s’agit pas d’amour véritable.

La quatrième composante est upékshâ, I’équanimité, ou bien encore la liberté. Dans l’amour véritable, on obtient la liberté. Quand on aime, on offre la liberté à celui ou à celle qu’on aime. Dans le cas contraire ce n’est pas de l’amour véritable. Il faut aimer de telle sorte que la personne aimée se sente libre, non seulement autour d’elle mais aussi à l’intérieur. « Chéri(e), as-tu assez d’espace dans ton cœur et autour de toi ? » Voilà une question intelligente pour vérifier si votre amour est une chose véritable.

Aimer, c’est être là

Aimer, dans le contexte du bouddhisme, c’est tout d’abord être là. Mais être là n’est pas une chose facile. Il faut un peu d’entraînement, un peu de pratique. Si vous n’êtes pas là, comment pouvez-vous aimer ? Etre là, c’est tout un art, l’art de la méditation. Parce que méditer, c‘est produire votre présence véritable dans l’ici et maintenant. La question qui se pose est : avez-vous du temps pour aimer ?

Je connais un garçon de douze ans à qui son père a un jour demandé : « Mon garçon, que veux-tu comme cadeau d’anniversaire ? » Il ne savait pas comment répondre à ce père, qui est un homme très riche capable d’acheter n’importe quoi à son garçon. Mais le garçon ne voulait rien, sauf la présence de son père. C’est parce que le rôle que joue le père l’occupe beaucoup qu’il n’a pas de temps à consacrer à sa femme et à ses enfants. Être riche est un obstacle à l’amour. Quand vous êtes riche, vous voulez continuer à l’être, et vous investissez ainsi tout votre temps, toute votre énergie dans la vie quotidienne pour pouvoir continuer à l’être. Si ce père comprend ce qu’est l’amour véritable, il s’arrangera pour trouver du temps pour son fils et pour sa femme.

Le plus précieux cadeau que l’on puisse offrir à celui ou à celle que l’on aime est notre vraie présence. Comment faire pour être vraiment là ? Ceux qui ont pratiqué la méditation bouddhique savent que méditer c’est avant tout être présent : pour vous-même, pour ceux ou celles que vous aimez, pour la vie.

Je vous propose donc une pratique très simple, celle de la respiration consciente : « J’inspire – je sais que j’inspire ; j’expire – je sais que j’expire ». Si vous faites cela avec un peu de concentration, alors vous pouvez être là vraiment, parce que dans notre vie quotidienne notre esprit et notre corps sont rarement ensemble. Notre corps peut être là, mais notre esprit est ailleurs. Peut-être êtes-vous perdu dans le regret concernant le passé ? Peut-être dans les soucis concernant le futur ? Ou bien êtes-vous préoccupé par vos projets, par la colère ou par la jalousie ? Et donc votre esprit n’est pas vraiment là avec votre corps.

Entre l’esprit et le corps il y a quelque chose qui peut servir de pont. Au moment où vous commencez à pratiquer la respiration consciente, votre corps et votre esprit commencent à se rejoindre l’un et l’autre. Il faut seulement dix à vingt secondes pour réaliser ce miracle appelé unicité du corps et de l’esprit. Avec la respiration consciente, vous pouvez amener corps et esprit ensemble dans le moment présent, et chacun de nous peut le faire, même un enfant. Le Bouddha nous a laissé un texte absolument indispensable : l’Anapanasati sutta, le Discours sur la pratique de la respiration consciente. Si vous voulez vraiment pratiquer la méditation bouddhique, il faut étudier ce texte.

Si le père dont je parlais connaît cela, il va commencer à inspirer et à expirer dans la pleine conscience, et puis une ou deux minutes après il va venir vers son fils, il va le regarder avec un sourire et lui dire ceci : « Chéri, je suis là pour toi. » C’est le plus grand cadeau que l’on puisse faire à celui ou celle qu’on aime.

Dans le bouddhisme, on parle des mantra. Un mantra est une formule magique qui, une fois prononcée, peut changer complètement la situation, notre esprit, notre corps, la personne. Mais cette formule magique doit être prononcée dans un état de concentration, c’est-à-dire un état où corps et esprit sont absolument en unité.

Ce que vous prononcez alors dans cet état d’être devient un mantra.

Je viens donc vous offrir un mantra très efficace, non pas en sanskrit ou en tibétain, mais en français : « Chéri, je suis là pour toi. » Peut-être, ce soir, allez-vous essayer pendant quelques minutes de pratiquer la respiration consciente pour réunir corps et esprit. Vous vous dirigerez vers la personne que vous aimez, et avec cette pleine conscience, avec cette concentration, vous regarderez dans les yeux de celui ou de celle que vous aimez et vous commencerez à prononcer cette formule : « Chéri(e), je suis vraiment là pour toi. » Il faut dire cela avec votre corps et avec votre esprit en même temps, et vous verrez la transformation.

Avez-vous assez de temps pour aimer ? Pouvez-vous vous arranger pour que dans la vie quotidienne vous ayez un petit peu de temps pour aimer ? Nous n’avons pas beaucoup de temps ensemble, nous sommes trop occupés. Le matin, en prenant le petit déjeuner, on ne regarde pas la personne que l’on aime, on n’a pas assez de temps pour le faire. On mange très rapidement en songeant à autre chose, et parfois même on tient un journal qui cache le visage de celui ou de celle qu’on aime. Le soir, quand on rentre, on est trop fatigué pour pouvoir regarder la personne qu’on aime.

Il faut faire une révolution dans notre manière de vivre la vie quotidienne, parce que notre bonheur, notre vie sont à l’intérieur de nous-mêmes.

Reconnaître la présence de l’autre

Je voudrais maintenant vous offrir un deuxième mantra. Quand vous êtes vraiment là, vous avez la capacité de reconnaître la présence de l’autre. Etre là, c’est le premier pas, et reconnaître la présence de l’autre, c’est le deuxième pas. Aimer, c’est être ; être aimé, c ‘est être reconnu par l’autre. Si vous aimez quelqu’un et si vous continuez à ignorer sa présence, ce n’est pas de l’amour véritable. Peut-être n’avez-vous pas l’intention de I’ignorer, mais votre manière d’agir, de regarder, de parler ne manifeste pas ce désir de reconnaître la présence de l’autre. Quand on est aimé, on veut que l’autre reconnaisse notre présence, et ceci est une pratique très importante. Il faut s’arranger pour que vous puissiez faire cela : reconnaître la présence de celui ou de celle que vous aimez plusieurs fois chaque jour.

Pour atteindre ce but, il faut aussi pratiquer l’unicité du corps et de l’esprit. Pratiquez la respiration consciente trois fois, cinq fois, sept fois ; vous vous dirigez alors vers cette personne, vous la regardez avec pleine conscience, avec le sourire, et vous commencez à prononcer le deuxième mantra : « Chéri(e), je sais que tu es là, et j’en suis très heureux. » Si vous pratiquez ainsi, avec beaucoup de concentration et de pleine conscience, vous constaterez que cette personne s’épanouira immédiatement comme une fleur. Etre aimé, c’est être reconnu, et vous pouvez faire cela plusieurs fois par jour. Ce n’est pas difficile du tout, et c’est une véritable méditation.

Ce que vous faites en pleine conscience, c’est de la méditation. Quand vous touchez une fleur, vous pouvez la toucher avec les doigts, mais mieux encore vous pouvez la toucher avec votre pleine conscience. « J’inspire – je sais que la fleur est là ; j’expire – je souris à la fleur ». Pendant que vous pratiquez ainsi, vous êtes vraiment là et en même temps la fleur est là. Si vous n’êtes pas vraiment là, rien n’est là. Le coucher de soleil est quelque chose d’admirable, comme la pleine lune, mais comme vous n’êtes pas vraiment là, le coucher de soleil n’est pas pour vous, la pleine lune n’est pas pour vous. De temps en temps, je me permets de regarder la pleine lune, je fais une inspiration et une expiration profondes et je pratique : « Je sais que tu es là, et j’en suis très heureux. » Je pratique cela avec la pleine lune, avec les fleurs de cerisier… Il y a des merveilles qui nous entourent, mais il faut les reconnaître, sinon il n’y a pas de vie.

Le Bouddha nous a dit ceci : « Le passé n’est plus là, le futur n’est pas encore là, il n’y a qu’un seul moment où la vie est disponible et c’est le moment présent. » Méditer, c’est ramener corps et esprit vers le moment présent pour que vous ne ratiez pas votre rendez-vous avec la vie.

Albert Camus a écrit un roman, L’Étranger, où son personnage, Meursault, est condamné à mort. Trois jours avant son exécution, il est capable, pour la première fois de sa vie, de toucher le ciel bleu. Il est dans sa cellule, il regarde le plafond, il a découvert un carré de ciel bleu correspondant à la lucarne. Chose étrange, un homme de quarante ans peut voir le soleil pour la première fois. Bien sûr, il a regardé les étoiles, le ciel bleu plus d’une fois, mais cette fois-là c’est la vraie. On ne sait pas comment il a pu toucher le ciel bleu d’une manière si profonde. Le moment de conscience décrit par Camus, c’est la pleine conscience. Soudain, vous êtes capable de toucher la vie.

L’énergie qui nous aide à toucher la vie profondément est appelée dans le bouddhisme smrti, l’énergie de la pleine conscience Tout le monde possède une graine (bîja) de cette énergie. Si on pratique le toucher profond, si on pratique la respiration profonde, on peut générer cette énergie.

Quand vous inspirez, vous reconnaissez alors que c’est une inspiration ; quand vous expirez, vous êtes au courant du fait que c’est une expiration. Reconnaître ce qui est là dans le moment présent, c’est l’attention, c’est l’énergie de la pleine conscience. Alors, avec ce mantra vous allez pratiquer la reconnaissance de la présence de la personne que vous aimez : « Chéri(e), je sais que tu es là, et j’en suis très heureux. »

C’est de la méditation authentique. Dans cette méditation-là, il y a à la fois de l’amour, de la compassion, de la joie et de la liberté : les quatre composantes de l’amour véritable dont parle le Bouddha.

Être là quand l’autre souffre

Le troisième mantra est utilisé dans le cas où la personne que vous aimez souffre. Quand vous vivez dans la pleine conscience, vous savez ce qui arrive dans le moment présent, dans votre situation. Il vous est donc facile de constater que la personne que vous aimez est en train de souffrir. Vous allez alors à elle ou à lui, corps et esprit unifiés, avec concentration, et vous prononcez le troisième mantra : « Chéri(e), je sais que tu souffres, c’est pourquoi je suis là pour toi. » Parce ce que lorsqu’on souffre on a très besoin de la présence de celui ou de celle qu’on aime. Si l’on souffre et que l’homme ou la femme que l’on aime l’ignore, on souffre alors davantage. Ce que l’on peut donc faire, et tout de suite, c’est manifester sa vraie présence auprès de la personne aimée et prononcer le mantra avec vigueur : « Chéri(e), je sais que tu souffres, c’est pourquoi je suis là pour toi. » Avant que vous ne fassiez quelque chose pour l’aider elle reçoit déjà un soulagement. Votre présence est un miracle, votre compréhension de sa douleur est un miracle, et vous pouvez offrir tout de suite cet élément de votre amour.

Essayez d’être là vraiment, pour vous-même, pour la vie et pour ceux et celles que vous aimez. Reconnaissez la présence de ceux et celles qui vivent au même endroit que vous, et essayez d’être là quand une personne souffre, parce que votre présence est si précieuse pour elle. On pratiquera ainsi l’amour vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Surmonter l’amour-propre

Le quatrième mantra est plus difficile à pratiquer. C’est le cas où vous-même souffrez, et vous pensez que votre souffrance a été créée par la personne que vous aimez le plus au monde. Si c’était une autre personne qui vous avait dit cela, ou qui vous avait fait cela, vous souffririez sans doute moins. Mais dans ce cas, c’est la personne que j’aime le plus au monde qui m’a dit cela, qui m’a fait cela, et je souffre davantage. Je suis profondément blessé par le fait que ma souffrance a été causée par la personne que j’aime le plus. Je préfère aller dans ma chambre, la fermer et pleurer dans la solitude. Je refuse d’aller à lui ou à elle pour demander une aide. C’est l’amour-propre qui constitue alors l’obstacle.

Dans l’enseignement du Bouddha, dans l’amour véritable il n’y a pas de place pour l’amour-propre. Si vous souffrez, chaque fois que vous souffrez il faut aller à lui, ou à elle, et d’abord demander son aide. Cela, c’est l’amour véritable. Ne laissez pas l’amour-propre vous séparer. Si vous pensez que votre amour pour lui ou pour elle est un vrai amour, il faut surmonter 1‘amour-propre, il faut toujours aller à lui ou à elle. C’est pourquoi j’ai inventé ce mantra pour vous. Pratiquez pour réaliser l’unicité du corps et de 1’esprit, avant d’aller à lui ou à elle pour prononcer le quatrième mantra : « Chéri(e), je souffre, aide-moi s’il-te-plaît. » C’est très simple, mais très difficile à faire. (…)

L’écoute profonde

Vous avez reçu la transmission des quatre mantra de la pratique de l’amour véritable. Vous savez qu’il n’est pas difficile de pratiquer ces mantra. Il faut les apprendre par cœur, et il faut avoir du courage, de la sagesse et de la joie pour pouvoir les pratiquer.

Mais si la situation est déjà devenue très difficile, que peut-on faire ? Si l’amour a causé trop de souffrances entre vous deux. Dans l’apparence, on fait en sorte que les autres pensent que l’on vit encore ensemble, qu’on a encore de la joie à vivre ensemble, mais dans l’essence, il n’y a plus de joie, il n’y a plus de bonheur, il n’y a même plus de communication. On a perdu la capacité d’écouter et de parler. La communication est devenue difficile, voire impossible. Comment faire dans cette situation ? Nous avons vécu ensemble, et nous avons fait souffrir l’autre personne.

Dans le bouddhisme, il est question de samyojana, le bloc de souffrance en nous, que l’on traduit par « formation intérieure ». Quand vous dites quelque chose qui fait souffrir une autre personne, elle reçoit une « formation intérieure ». Si la personne est versée dans la méditation bouddhique, elle saura comment dénouer ce nœud-là, sinon elle le laissera ainsi dans la profondeur de sa conscience. Si vous êtes quelqu’un qui pratique la pleine conscience, vous pouvez être au courant qu’un nœud s’est formé dans la personne que vous aimez, et vous savez comment le dénouer.

Chaque jour, on dit ou on fait des choses qui peuvent laisser des « formations intérieures » à la personne que l’on aime. Ensuite, les blocs de souffrance, de douleur sont là, et la personne que l’on aime est devenue quelque chose comme une bombe prête à exploser à tout moment. Quelques mots suffisent pour déclencher la colère de cette personne, que vous avez peur d’approcher et à qui vous avez peur de parler parce qu’elle est devenue une bombe chargée de trop de souffrance. Et lorsque vous cherchez à vous éloigner d’elle, cette personne pense que vous la méprisez, et sa souffrance s’accroît. Vous aussi êtes devenu une bombe, parce que vous avez perdu la capacité de parler avec le langage de la paix, de la compréhension ; vous avez perdu la capacité d’écouter, et ainsi toute communication est devenue impossible.

Dans le bouddhisme, on parle d’un bodhisattva appelé Avalokiteshvara, celui qui a la capacité d’écouter et de comprendre la souffrance des autres. Si l’on évoque son nom, c’est pour apprendre à écouter. Dans la vie quotidienne, I’écoute profonde, I’écoute attentive constitue une méditation. Si vous connaissez la pratique de la respiration consciente, si vous voulez garder le calme et la compassion vivants en vous, alors l’écoute profonde sera possible.

Avec la pratique de la méditation marchée, de la méditation assise, de la respiration consciente, on peut cultiver le calme, on peut cultiver l’attention, on peut cultiver la compassion pour pouvoir s’asseoir là et écouter l’autre. L’autre souffre tant qu’il a besoin de quelqu’un pour l’écouter, et vous, vous êtes la personne qui peut le faire. Si l’on a recours à un psychothérapeute c’est parce que personne dans la maison ne peut écouter. Il doit être capable de s’asseoir là pour vraiment écouter, mais je connais des thérapeutes qui ont trop souffert et qui n’ont pas véritablement la capacité d’écouter leurs clients.

Si l’on aime, on doit donc s’entraîner pour pouvoir écouter. En écoutant avec attention, calme, compréhension, on peut soulager la souffrance de l’autre personne. Une heure passée ainsi peut déjà soulager beaucoup de peine, beaucoup de douleur chez l’autre personne

Au Village des Pruniers, où nous pratiquons I’écoute profonde est une pratique très importante. Chaque semaine, nous nous réunissons une ou deux fois pour pratiquer l’écoute profonde de l’autre. Pendant que I’on écoute, on ne dit rien, on respire profondément, on ouvre son cœur pour pouvoir vraiment écouter l’autre. Le seul fait d’être là et d’écouter attentivement peut déjà offrir un grand soulagement à l’autre. Une heure d’écoute de ce genre est très efficace, et c’est quelque chose de très précieux qui peut être offert à celui ou celle que vous aimez.

Extrait de « Vivre en pleine conscience ; paix et joie dans les tribulations de la vie » du V. Thich Nath Hanh © Ed. Terre du Ciel, Coll. Joyaux.

Thich Nhat Hanh

Maître bouddhiste vietnamien dont l’action, le courage et l’amour de son peuple l’ont fait proposer par Martin Luther King pour la Prix Nobel de la Paix en 1967. Réfugié politique en France depuis 1972, il réside en Dordogne au Village des Pruniers et ne cesse de donner des enseignements et d’animer des retraites à travers le monde.

 

<<Retour à la revue