La jñana dakini Nigouma

Nigouma naquit au Cachemire, dans un pays appelé “ La terre de la grande magie ”, qui fut aussi le lieu de naissance de nombreux mahasiddha, parmi lesquels Naropa dont elle était la sœur. Elle avait choisi de renaître femme pour aider les êtres ; dans des existences antérieures elle avait atteint une réalisation extrêmement avancée.

Dans sa manifestation en tant que Nigouma, elle était une dakini de connaissance primordiale arrivée à la dixième terre de bodhisattva, le parfait éveil. Son corps, qui était un corps d’arc-en-ciel, transcendait complètement le niveau habituel. Elle reçut les enseignements directement de Vajradhara et eut pour principal disciple Khyoungpo Nèldjor.

Après que Khyoungpo Nèldjor eut reçu des enseignements des plus grands maîtres, ceux-ci lui dirent que quelqu’un de sa qualité devrait maintenant suivre des enseignements de la grande bodhisattva Nigouma, inséparable de Vajradhara. Il demanda où la rencontrer, et il lui fut répondu que les êtres ordinaires ne pouvaient la rencontrer, étant donné qu’elle n’avait plus de corps physique mais seulement un corps d’arc-en-ciel ; mais que toutefois, sa présence se manifestait n’importe où, aux êtres ayant atteint un haut niveau spirituel et que, de temps en temps, elle visitait les plus grands charniers, conduisant une cohorte de dakini et présidant à d’immenses fêtes vajra. Entendant parler de Nigouma, Khyoungpo Nèldjor éprouva une émotion extrême, et pleura à chaudes larmes. Immédiatement, il partit à sa recherche dans le grand charnier de Sossaling, formulant des souhaits intenses pour la rencontrer.

Quand il y arriva, il vit, haut dans le ciel, une divinité à la peau brune tenant un trident, un kapala, et parée de nombreux ornements d’os. Pendant qu’il la contemplait, il voyait tantôt une seule dakini, tantôt de nombreuses, certaines assises en méditation et d’autres dans différentes postures de danse. Sûr qu’il s’agissait de Nigouma avec son entourage, il rendit hommage et requit l’enseignement. L’apparition se moqua tout d’abord de lui, puis l’avertit :

« Je suis une dakini ogresse, et celles de mon entourage sont mes semblables, sauve-toi avant que nous ne te dévorions. »

Mais les paroles de Nigouma ne découragèrent pas Khyoungpo Nèldjor qui réitéra sa demande. Nigouma lui dit alors que s’il voulait vraiment recevoir l’enseignement, il devait offrir de l’or. Khyoungpo Nèldjor en avait et il offrit tout de suite cinq cents onces de poudre d’or. Nigouma les prit, projeta cet or en l’air, la poudre retombant sur toute la forêt. Khyoungpo Nèldjor fut surpris, puis Nigouma lui dit qu’il qu’elle n’avait pas besoin d’or car, pour elle, les trois sphères de l’univers étaient déjà or. Cela confirma Khyoungpo Nèldjor dans sa confiance qu’il s’agissait bien de Nigouma : une vraie ogresse se serait certainement attachée à cet or.

Khyoungpo Nèldjor reçut de Nigouma la transmission des six yogas de Nigouma, du Mahamudra et des cinq enseignements d’or. Il consigna ces enseignements sur un parchemin qu’il roula et conserva dans un reliquaire autour de son cou. C’est ainsi que cette tradition du Mahamudra fut connue sous le nom du Mahamudra-reliquaire.

Après lui avoir transmis tous ses enseignements, Nigouma lui dit que seuls elle et le mahasiddha Lawapa les avaient reçus, qu’ils devaient être tenus secrets durant sept générations, n’étant transmis à chacune qu’à un unique détenteur ; et qu’après ces sept générations seulement, ils pourraient être transmis largement . Elle fit aussi la prédiction que, non seulement lui, mais aussi tous ses successeurs auraient dans le futur la possibilité de la rencontrer.

Traduit du tibétain par le Comité Lotsawa

Exergues

« de temps en temps, elle visitait les plus grands charniers, conduisant une cohorte de dakini »

« , pour elle, les trois sphères de l’univers étaient déjà or. »

 

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